LA LEÇON DE DISCERNEMENT D’UNE REINE  DISPARUE – ELISABETH II -  ET D’UN PAPE  - FRANCOIS - QUI SALUAIT SA FOI.

Publié le 18 Septembre 2022

Pour l’avoir ici-même signifié maintes fois, je ne crois pas au hasard. Mais pas du tout.

Et dans ce cas, comme tout un chacun quelque peu interpelé par le devenir, notre devenir, lorsque sera venu le moment de prendre congé pour l’éternité et que la question se posera pour ne pas dire, s’imposera, de s’en remettre à la transcendance divine, je serai à même de toucher « l’autre » réalité.  Au-delà des possibilités actuelles de l’intelligible.

J’entends déjà les sirènes de la raison et les quolibets de quelques bons amis me reprochant d’avoir succombé à quelques dérèglements mystiques.

Prenant à témoin la multitude stellaire et l’infini de l’infini pour me vouer aux gémonies et me convaincre que Dieu n’est au fond qu’une vue de l’esprit.

Singulière approche intellectuelle.

Pourtant les plus grands parmi les savants n’ont eu de cesse de stimuler leur cerveau pour comprendre le plus difficilement compréhensible qui puisse donner un sens à notre existence.

Albert Einstein entre autres qui posa la question de fond en reconnaissant que ce qui l’intéressait vraiment c’était de savoir si Dieu avait eu un quelconque choix en créant le monde.

Dans son ouvrage « Neige de printemps » Yukio Mishima ose quant à lui un rapport entre Dieu et le hasard . Je le cite :

« Parler du hasard, c’est nier la possibilité de toute loi de cause à effet. Le hasard est finalement l’unique élément irrationnel que peut accepter le libre arbitre… Ce concept du hasard, de la chance, constitue la substance même du Dieu des Européens, ils possèdent là une divinité qui tire ses caractéristiques de ce refuge si essentiel au libre arbitre ».

Considéré comme l’un des écrivains majeurs de la littérature japonaise cet écrivain à la réputation et l’oeuvre sulfureuses a commis quelques livres d’exception.

La litote dans sa démarche littéraire est un moyen de restituer les sentiments humains sans pour autant se départir d’une permanente référence à l’éternité et à l’infini. 

En somme, l’accession au bonheur. Tout simplement.

Pour François Vannucci – chercheur en physique des particules, – le hasard, parce qu’il mesure notre ignorance, semble lié à l’idée de Dieu, Sinon, pourquoi prierait-on dans les moments incertains ?

Une manière comme une autre de restreindre le domaine de l’inconnu.

Explication :

 

« Une éclipse de Soleil, par exemple, s’interprétait comme un signe maléfique avant que la mécanique céleste l’ait rabaissé à un événement prédictible. Ainsi, le hasard dépend de notre niveau de connaissance et il était sans doute plus naturel d’avoir la foi dans les temps anciens quand l’homme vivait dans un monde limité et plein de mystères. Aujourd’hui, la science nous révèle un immense univers dont on comprend, grosso modo, le mode de fonctionnement. Elle déshumanise le monde alors que l’idée de Dieu est éminemment humaine. »

Il n’empêche que la proportion de croyants parmi les scientifiques est la même que celle de la population générale, et un physicien recevant le Prix Nobel déclarait :

 « Découvrir une loi scientifique, c’est lire ce qui est écrit dans le cerveau de Dieu. »

Dans un Univers entièrement déterministe et prédictible, il n’y a plus de place pour le surnaturel. La physique classique donne une réalité du monde connue de tout temps puisqu’on remonte vers le passé et on prédit l’avenir en appliquant les équations consacrées :

« L’expérience religieuse cosmique est la plus noble, la plus forte qui puisse surgir d’une recherche scientifique profonde. Celui qui ne comprend pas les formidables efforts, le don de soi, sans quoi rien ne se crée de nouveau dans la pensée scientifique, celui-là ne saurait évaluer la force du sentiment qui seul peut faire naître une telle œuvre, éloignée comme elle est de l’immédiate vie pratique. » estimait pour sa part Albert Einstein.

FOI ET CROYANCES

Tout est finalement affaire de discernement déclarait le pape François lors de l’une de ses récentes catéchèses. Et la récente disparition de la reine Elisabeth place cette notion de discernement au cœur de l’une des problématiques religieuses actuelles.

 

Qui plus est, au sein du Royaume uni où le titre de « défenseur de la foi » fut conféré depuis 1521 à tous les monarques de ce pays faisant naturellement de son souverain le chef de l’Église d’Angleterre.

La souveraine disparue avait la foi en son étymologie latine.  Nul ne peut le contester.

En revanche, son fils et successeur, Charles III, autrement plus nuancé dans ses propos risque de déroger à cette règle transcendantale en déclarant qu’il serait le défenseur des croyances et non de la foi.

Une nuance de « lèse-majesté » sinon un manquement manifeste à la sacro-sainte règle monarchique.

D’autant que cette double attitude peuvent être complémentaires. Mais voilà.

Affaire à nouveau de discernement :

« Il y a une histoire qui précède celui qui discerne, une histoire indispensable à connaître, car le discernement n’est pas une sorte d’oracle ou de fatalisme ou un objet de laboratoire, comme tirer au sort entre deux possibilités. Les grandes questions naissent lorsque nous avons déjà fait un bout de chemin dans la vie, et il faut revenir sur ce parcours pour comprendre ce que nous cherchons. Si l’on fait un bout de chemin dans la vie, là : « Mais pourquoi est-ce que je marche dans cette direction, qu’est-ce que je cherche ? », et là on effectue le discernement. » commente le souverain pontife.

Et d’affiner son analyse :

« C’est ce que nous devons apprendre : écouter son propre cœur. Pour savoir ce qui se passe, quelle décision prendre, pour porter un jugement sur une situation, il faut écouter son cœur. Nous écoutons la télévision, la radio, le téléphone portable, nous sommes des maîtres de l’écoute, mais je te demande : sais-tu écouter ton cœur ? T’arrêtes-tu pour dire : « Mais comment va mon cœur ? Est-il satisfait, est-il triste, cherche-t-il quelque chose ? ».

Pour prendre de bonnes décisions, il faut écouter son cœur insiste encore le souverain pontife :

« Écoutez bien : Dieu agit à travers des événements imprévus, comme par hasard, il m’est arrivé cela par hasard, j’ai rencontré cette personne par hasard, j’ai vu ce film par hasard, ce n’était pas prévu mais Dieu agit à travers des événements imprévisibles, et même dans les contretemps : « Mais je devais aller me promener et j’ai eu un problème au pied, je ne peux pas… ».

LA PLUS BELLE EMOTION

La parabole de l’Évangile de Matthieu  est en soi une réponse :

« Un homme labourant un champ tombe accidentellement sur un trésor enfoui. Une situation totalement inattendue. Mais ce qui est important, c’est qu’il la reconnaît comme l’aubaine de sa vie et qu’il décide en conséquence : il vend tout et achète ce champ (cf. 13,44). »

 

 

Et le pape d’en tirer la leçon. Sa leçon :

« Un conseil que je vous donne, soyez attentifs à l’inattendu. Celui qui dit : « mais ce hasard, je ne m’y attendais pas ». Là, c’est la vie qui te parle ; est-ce le Seigneur ou est-ce le diable qui te parle ? Quelqu’un. Mais il y a quelque chose à discerner, la façon dont je réagis devant l’inattendu.

Mais j’étais bien tranquille à la maison et ‘boum, boum’, la belle-mère arrive et comment réagis-tu avec ta belle-mère ? Est-ce de l’amour ou autre chose en toi ? Et tu fais le discernement. Je travaillais bien dans mon bureau et un camarade vient me dire qu’il a besoin d’argent ; et toi, comment as-tu réagi ? »

Voir ce qui se passe lorsque nous vivons des choses auxquelles nous ne nous attendons pas et là, nous apprenons à connaître notre cœur et comment il se sent :

« Ainsi, le discernement aide à reconnaître les signes par lesquels le Seigneur se laisse rencontrer dans les situations imprévues, voire désagréables, comme le fut pour saint Ignace sa blessure à la jambe. De celles-ci peut naître une rencontre qui change la vie pour toujours, comme dans le cas d’Ignace. Quelque chose peut surgir qui te rend meilleur en chemin, ou pire, je ne sais pas, mais rester attentif, et le plus beau fil conducteur est donné par les imprévus : « comment est-ce que je me comporte face à cela ? » ajoute l’évêque de Rome.

Et pourtant :

« La plus belle émotion que nous puissions éprouver est l’émotion mystique. C’est là, le germe de tout art et de toute science véritable… Savoir que ce qui nous est impénétrable existe vraiment et se manifeste comme la plus haute sagesse et la plus rayonnante beauté dont les formes les plus grossières sont seules intelligibles à nos pauvres facultés, cette connaissance, voilà ce qui est au centre du véritable sentiment religieux. »

Dans son entité, la vie humaine ne peut uniquement s’expliquer par la science ; d’ailleurs, ne dit-on pas communément que la science sans religion est boiteuse et que la religion sans science est aveugle.

La physique quantique – dont Einstein était l’un des pères fondateurs après avoir repris puis complété les travaux de Max Planck sur les quantas -  offre, quant à elle, une échappatoire sinon une planche de salut à ce questionnement existentiel.

En effet, le hasard microscopique nous restitue opportunément un espace de liberté par le simple fait qu’il est à la base des mutations biologiques sans lesquelles nous ne serions pas.

Selon la locution interjective : point barre !

 

Bernard Vadon

 

Rédigé par Bernard Vadon

Publié dans #J - 2 - B ( Journal )

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