Entre le mal et le bien : une affaire de choix et de liberté. De conscience aussi.

Publié le 2 Octobre 2022

 

Le déroulé – sur Netflix -  de la mini-série intitulée "Dahmer : Monstre - L'histoire de Jeffrey Dahmer"  ( un succès sur la toile) hors mis pour les amateurs de films d'horreur, est, à mes modestes yeux, de la veine de l'ensemble des séries dont on connait la finalité, à savoir de tenter de capter le pseudo intérêt du lambda et la possibilité de prendre éventuellement un café ou un verre entre deux épisodes souvent éternels d'ennui !

En revanche, les trois derniers épisodes de ce film redonnent envie de renouer avec cette incroyable (parce que vraie) et horrible affaire.

Peut-être parce que l'on y aborde le délicat problème du mal et du bien.

La confrontation entre le pasteur et le tueur éclairant, de part et d'autre, notre lanterne. Et donnant une dimension sociale et plus encore humaine à ce drame épouvantable.

Entre Glenda Claveland la locataire touchante et courageuse de la résidence maudite qui se bat avec sa conscience pour offrir à terme un pardon impossible, le prisonnier vengeur endoctriné jusqu'aux ongles qui se donne quant à lui de bonnes raisons pour froidement supprimer deux compagnons d'infortune, dont le Jeffrey maudit, l'administration qui selon ses bonnes habitudes tient ses prétendues mais prudentes distances, et surtout les policiers abjects, volontairement incompétents qui jouent scandaleusement de leur pseudo pouvoir et soutiens populaires jusqu'à intimider leur supérieur qui laisse paraître un peu plus d'humanité dans ce drame : Dahmer – Monstre- est un parfait raccourci de la nature humaine captée sous son jour le plus détestable. Du Zola pur jus.

Et cela, indépendamment du détraqué - il y a peut-être quelques raisons à cela, dont l'éducation et le désordre familial en particulier - qui a pu impunément commettre ces épouvantables forfaits ... allant jusqu'à passer par-dessus l'institution et les préceptes du droit pour considérer à terme qu'il mérite la mort.

Avec au passage cette courte rémission par une référence à l'Histoire Sainte et singulièrement la Passion et la Crucifixion.

Un reproche cependant : l'objectif de la caméra bloqué sur la communauté noire et homosexuelle. Comme si ...

En tout cas, une focalisation qui n'a pas manqué, sans surprise d'irriter les militants.

Et surtout un ostracisme dérangeant. Dommage.

 

DEUX FORCES ANTAGONISTES

 

Pourquoi vouloir faire le mal ? Y a-t-il une raison ou une volonté de l’exercer ? Fait-on réellement le mal pour le mal ? 

Ces interrogations et l’emprise de ses désirs ont vivement tracassé mon maître Saint-Augustin souvent confronté à une lutte intérieure pour contrôler ses pulsions jusqu’à ce que, converti au christianisme, il ait une révélation et que Dieu lui suggère par voix interposée - en l’occurrence celle d’Ambroise de Milan - la lecture de la Bible autrement qu’il ne l’avait fait auparavant.

Notre société est aujourd’hui et à tous égards confrontée au mal toutes versions et préjugés  confondus. Tous les moyens étant bons et exploités pour faire du mal une philosophie. Un comble !

Et pourtant.

Dans « Le maître de la Terre » de Robert- Hugh Benson, le chef de l’Église catholique, le pape François, a retenu « le drame de la colonisation idéologique » et, bien avant lui, Saint Augustin, dans ses « Confessions » et plus encore dans « La cité de Dieu » sinon et par volonté de l’auteur « le livre des deux cités », a donné de la confrontation du mal et du bien une explication pour le moins inédite. 

Effectivement, ce dernier, après neuf ans de manichéisme - une religion longtemps considérée comme une secte chrétienne partisane d’une sorte de division de l’univers en deux parties : le Bien, représenté par le Dieu-Lumière et le Mal inspiré du Royaume des ténèbres. Une métaphysique dualiste allant jusqu’à partager la volonté humaine également en deux : l’une bonne et l’autre mauvaise où l’homme se retrouve au cœur d’une lutte entre deux forces antagonistes. Le mal constituant une substance ontologique en soi, à laquelle on ne peut échapper qu’en menant une vie ascétique. Suite à quoi, l’homme ne serait pas directement responsable de ses actes puisque, lorsqu’il commet le mal, c’est une force mal intentionnée qui le pousse à agir ainsi.  Saint Augustin se détache alors de ce concept et se convertit à la religion chrétienne …  qu’il avait considérée comme une religion de « bonne femme ». (sic)

Après sa conversion, Augustin décide de quitter son métier de rhéteur pour mener une vie d’écrivain chrétien avant d’accéder au rang d’évêque. Il ne manque alors pas, de critiquer non sans véhémence les manichéens, en mettant notamment à mal leur dualisme ontologique et leur tendance à déresponsabiliser les hommes de leurs actes.

Désormais, il les tient pour de « vains discoureurs et séducteurs des âmes » qui dédouanent les hommes de leurs actes et de leurs responsabilités en faisant appel à une substance maléfique extrinsèque comme cause première du mal. Son discours est d’autant plus dur envers eux que c’est aussi une façon pour lui de montrer que son adhésion au manichéisme est révolue, et sa position chrétienne sans ambiguïté.

Il développe alors une toute autre idée du mal, considérant que tout ce qui est ne peut être mauvais en soi, puisque c’est d’essence divine. Et d’affirmer :

 

« Tout ce qui est, est bon ; et le mal dont je cherchais l’origine n’est pas une substance, car s’il était une substance, il serait bon. » 

 

Toujours selon lui, si nous voyons le mal, c’est que nous voyons mal et que nous commettons une erreur de jugement. 

À titre d’exemple, le serpent que l’on peut considérer comme un mal ne peut cependant l’être en lui-même. Le serpent appartient à un tout, il a une cause et une utilité qui contribuent à la perfection de ce monde.

En ce sens l’influence de la philosophie platonicienne est flagrante.

Mais le mal peut aussi être le fruit de l’orgueil plaçant l’amour de soi au-dessus de toutes choses.

DEFAILLANCE DE LA VOLONTE

Augustin prend pour explication l’exemple du célèbre larcin commis durant sa jeunesse, un crime nocturne dans sa seizième année d’ailleurs écrit dans ses « Confessions » (dont je conseille vivement et à nouveau la lecture) afin d’alimenter sa réflexion et son interrogation quant aux raisons qui l’ont poussé à agir de la sorte.

La séquence :

Avec une bande de « mauvais garçons », il vole des poires pour le simple plaisir du vol, donc du mal, puisque les poires ne seront même pas consommées mais jetées aux cochons.

Conclusion augustinienne : le goût du mal relève du pur orgueil, et de la volonté de braver l’interdit et l’autorité divine. Un acte qui n’est pas sans rappeler celui commis par Adam et Ève goûtant au fruit défendu, dans le jardin d’Éden. Le péché qu’ils commirent relevait de la même désobéissance à l’autorité. Dans la pensée d’Augustin, ce n’est plus une force maléfique extrinsèque à l’individu qui serait la source du mal, mais l’individu lui-même. Nous voilà rassurés. Au moins en partie.

Le mal n’existe donc pas ontologiquement, au sens de l’être. Il devient le fruit d’une défaillance de la stricte volonté. L’homme dispose d’un libre arbitre : bon à l’origine comme toutes les choses issues de Dieu, il n’est pas exempt de faiblesses.

Problème :  l’homme n’a pas toujours eu une volonté défaillante.

En effet, depuis le péché originel commis par Adam et Ève tous les hommes qui naissent sur Terre sont, selon la désignation adéquate, des  pécheurs auxquels échappent le contrôle d’eux-mêmes. La volonté n’a plus la force de vouloir et de faire pleinement le bien. Même s’il n’y en a qu’une, elle est subordonnée à ses faiblesses dans la mesure où l’on peut vouloir et ne pas vouloir en même temps :

« C’était moi qui voulais ; c’était moi qui ne voulais pas. Ni je disais pleinement oui, ni je disais pleinement non. D’où cette lutte avec moi-même. » 

Une citation reprise par Augustin en référence aux écrits de saint Paul : 

« Car je ne sais pas ce que je fais ; le bien que je veux, je ne le fais pas; mais le mal que je hais, je le fais » (Épître aux Romains, 7:15).

L’AMOUR DE DIEU

Selon saint Augustin, seule la grâce de Dieu peut alors aider l’homme à galvaniser sa volonté et la faire tendre complètement vers le Bien. Sans ce recours à la grâce divine, il semble tout simplement impossible d’y parvenir. C’est la raison pour laquelle l’homme doit faire passer l’amour de Dieu avant toute chose ; et ce, jusqu’au mépris de soi.

De fait, l’amour de soi doit être relégué au second plan, car il revient à détourner sa volonté du divin pour privilégier sa propre personne et les biens de ce monde, éphémères et voués à disparaître. 

Comme l’écrit Plotin, qui joua un rôle majeur dans la pensée de saint Augustin : 

« L’estime des choses d’ici-bas et le manque d’estime  des âmes pour elles-mêmes, c’est-à-dire : en tant qu’elles sont issues de Dieu, sont la cause de leur ignorance totale du dieu. » 

Mais dans la pensée de Plotin - philosophe gréco-romain de l'Antiquité tardive, représentant principal du courant philosophique appelé « néoplatonisme » : à travers lui, la pensée grecque classique affronte désormais les mouvements gnostiques plus ou moins proches du christianisme et du manichéisme - il s’agit d’une défaillance cognitive.  En bon platonicien, Plotin estimant qu’on ne pèche que par ignorance.

Saint Augustin, pour sa part, considère plutôt la défaillance comme celle de la volonté : on pèche et on commet le mal en raison d’une volonté impure, qui ne peut être purifiée que par la grâce.

Parmi les docteurs du christianisme, un trait distinctif caractérise saint Augustin, c’est qu’il est, parmi ces intellectuels, le plus philosophe.

Changez les conditions où la Providence mit en évidence son génie, faites-le naître deux siècles plus tôt, non pas à Thagaste - l’actuelle Souk Ahras, en Algérie, la ville natale de saint Augustin - mais à Athènes ou à Alexandrie, donnez-lui pour maître Ammonius  Saccas - philosophe grec d'Alexandrie, souvent considéré, en tant que maître de Plotin -en  lieu et place de saint Ambroise et celui qui sera un évêque d’exception troquera son habit de religieux contre le trois pièces d’un non moins grand directeur d’école.

Il dictera les Ennéades - ensemble de courts traités, rédigés en grec par Plotin - rallumera le flambeau du platonisme et portera dans les spéculations de la métaphysique la curiosité subtile et ingénieuse ainsi que la force d’abstraction et les éclairs sublimes de Plotin.

Mais à chacun sa tâche : celle de saint Augustin n’était pas de créer ou de rajeunir un système de philosophie, et, si de bonne heure le spiritualisme de Platon séduisit son intelligence, il ne put fournir à cette âme inquiète et tendre un aliment capable de suffire à son ardeur. Du même élan qui l’avait arraché au matérialisme de Manès pour le conduire à Platon, il courut se jeter dans les bras du Christ en dépassant la philosophie sans pour autant la déserter. Conduit par elle au seuil du temple, à son tour, il l’entraîna jusqu’au plus profond du sanctuaire, et, devenu chrétien, prêtre et évêque, il restera platonicien.

On aurait de la peine à citer un seul de ses innombrables écrits où ne se montre, par quelque endroit, cette alliance entre la foi du chrétien et la raison du philosophe. Cependant, nulle part il n’a pris soin de la consacrer avec autant de force, de grandeur et d’éclat que dans son livre : la célèbre Cité de Dieu. Un monument grandiose, littéraire et philosophique mais irrégulier. Cependant d’aucuns ne manqueront pas d’y reconnaître l’œuvre suprême où saint Augustin, après toute une carrière vouée à réunir les esprits et à pacifier les âmes, entreprit d’accomplir pour jamais l’union de la philosophie spiritualiste avec le dogme chrétien.

Voilà ce qui fait la grandeur de la Cité de Dieu.

On y a signalé avec raison le premier essai d’une philosophie de l’histoire ; elle est en réalité une philosophie du christianisme. 

 

L’IDEE DU BIEN

Si l’on voulait, sans sortir du tangage mystique, donner un titre exact à la Cité de Dieu, il faudrait l’appeler, de l’aveu de saint Augustin lui-même le Livre des deux Cités car le sujet de l’ouvrage c’est la lutte de la cité de Dieu contre la cité du diable, ou, pour parler en termes profanes, c’est ce combat du bien contre le mal qui fait le fond de la vie humaine et de toutes choses.

Pourquoi cette lutte ? Où en est l’origine ? Comment poursuit-elle son cours à travers les âges ? A quel terme doit-elle aboutir ?

Autant de questions dont le genre humain espère des réponses via la religion et la philosophie.

Un premier principe sur lequel tombent d’accord la philosophie de Platon et la religion du Christ, c’est que par-delà les oppositions de ce monde changeant, au-dessus des vicissitudes du temps et des limitations de l’espace, avant l’humanité, avant la nature, avant toute existence finie, il y a l’Être éternel, immuable, source unique de tous les êtres, il y a Dieu.

Dieu est un et triple tout à la fois. La raison de quelques sages avait soupçonné cette trinité mystérieuse. L’Évangile la consacre, la théologie la définit, l’église l’enseigne à tous les hommes.

 

« Dieu est donc bien le Père, Fils et Saint-Esprit, c’est-à-dire qu’il est tout à la fois l’être, l’intelligence et l’amour mais, sous cette variété de la nature divine, quand la raison cherche à saisir ce qui en fait l’unité, l’essence, et, pour ainsi parler, le dernier fond, elle trouve finalement que Dieu, c’est le bien. »

L’idée du bien est donc la première des idées, comme Dieu est le premier des êtres. Or, elle n’explique pas seulement l’essence de Dieu et le développement intérieur de ses puissances, elle explique surtout son opération extérieure à l’image de la création.

Dieu est en effet fécond et actif, bien qu’il n’agisse pas à la manière des hommes, qui épuisent, dans le cercle d’un espace restreint et dans le cours d’une durée bientôt disparue, l’effort inégal de leur imparfaite activité. Dieu agit selon ce qu’il est. Éternel et immense, sa puissance créatrice est indépendante de l’espace et du temps. Du sein de son éternité et de son immensité immobile naissent, par sa volonté, le temps, l’espace, avec tous les êtres destinés à les remplir.

Mais pourquoi Dieu tiendrait-il tellement à être fécond et créateur ?

Car il est parfait en soi et se suffit pleinement à lui-même.

Pourquoi sort-il de soi et fait-il être ce qui n’était point ?

A cette question, le christianisme et Platon, la Genèse et le Timée donnent la même réponse : Dieu crée, parce qu’il est bon.

De toute éternité, les types de tous les êtres possibles sont présents au regard de Dieu, car ils sont compris dans sa sagesse, dans ce Verbe incréé qu’il engendre éternellement et qui est la splendeur de sa propre essence. C’est là que Dieu se contemple soi-même, et, avec soi, tous les êtres idéalement enfermés dans les profondeurs de sa puissance infinie. Avant de vouloir et de faire le monde, il l’a donc pensé, et comme il a vu que cet ouvrage était bon, étant bon lui-même, il lui a donné l’existence et la vie. D’une rare évidence)

Mais ici s’élève de nouveau, plus obscur et plus pressant que jamais, l’inévitable problème : d’où vient alors le mal ?

Car si Dieu, premier et unique principe de toutes choses, est par essence le bien, s’il n’entre en action que par bonté, si enfin il n’a créé l’univers qu’après l’avoir conçu comme digne de lui c’est-à-dire comme bon, il semble impossible que le mal se rencontre en cette manifestation excellente d’un principe excellent.

El cependant, le mal est dans le monde. Comme il l’a rarement été.

Ne pouvant y avoir été mis par le Créateur, il faut qu’il vienne de la créature. Or, si nous essayons d’embrasser du regard l’ensemble des êtres qui peuplent l’univers, nous voyons qu’au-dessous de l’homme toutes les natures sont invariablement bonnes, quoiqu’il des degrés différents. Les plus humbles de toutes, celles qui sont privées non-seulement d’intelligence, mais de sentiment et de vie, contribuent toutefois par leur grandeur et leur simplicité immobiles à la beauté de la création. D’autres, avec le don de l’existence, ont celui de l’activité. Elles sortent d’un germe, s’épanouissent, communiquent la vie sans le savoir et sans le sentir, comme elles l’ont reçue, et périssent pour renaître sous des formes nouvelles dans une évolution sans fin.

 

PERRFECTION INFINIE

 

À ces aspects si riches de l’existence, il convient de joindre un attribut plus admirable encore : le sentiment. Voilà un nouvel ordre de natures qui s’élèvent par degrés du sentiment à l’intelligence, et, depuis le chétif vermisseau jusqu’au lion superbe, font paraître de plus en plus la puissance du Créateur.

Mais où elle éclate enfin tout entière, c’est dans ces natures supérieures faites pour entrer en partage avec le Verbe divin de son attribut le plus essentiel, la raison.

Ici encore, le bien a été départi à des degrés inégaux : l’âme humaine est formée à l’image de Dieu sauf que l’étincelle de raison qui l’éclaire est emprisonnée dans des organes corporels.

Mais, il est d’autres natures où brille en traits plus purs encore l’image du Créateur, ce sont les anges. Affranchis de toute entrave du corps et des sens, bien qu’ils aient le pouvoir de se manifester sous des formes visibles, ces êtres supérieurs ne sont que lumière, beauté, intelligence, amour. Il n’y a au-dessus d’eux que la perfection infinie et incommunicable de Dieu.

Telle est la hiérarchie magnifique dont l’univers nous présente le spectacle. Et tant que ces natures, si diversement bonnes, mais toujours bonnes dans leur espèce et à leur rang, garderont la pureté de leur origine, on chercherait, en vain et en elles, la première source du mal.

Alors, où est le fin mot de l’énigme ?

Tout simplement dans le terme liberté que tout créature raisonnable, ange ou homme, a reçu de Dieu.

Ainsi, comme les autres anges, à l’origine Satan était bon pur, innocent et heureux. Lui aussi était marqué du sceau de la liberté mais il est tombé. Une chute irréparable et fatale qui a préparé toutes les autres !

Notre monde du moment, au travers des guerres à répétition, de cette volonté de brûler le temps qui passe, le dérèglement climatique pour faire bonne mesure, est une malheureuse redite de ce comportement suicidaire.

Une explication parmi tant d’autres qui ne taraude pas l’esprit de ceux qui tout simplement ont la foi. Celle qui, dit-on communément, soulève les montagnes.

 

Bernard VADON

 

 

 

Rédigé par Bernard Vadon

Publié dans #J - 2 - B ( Journal )

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :