DE LOURDES A BETHARRAM : par ces temps agités, un temps fort de réflexion mariale.

Publié le 14 Août 2022

 

Creuset mystique et mystérieux, le site de Lourdes en France réunit, dans un contexte naturel peu amène, à la limite austère, tout ce qu’une certaine humanité, assoiffée d’espérance et d’absolu,  est pourtant, et paradoxalement, venue quérir en ce lieu qui n’a rien de paradisiaque.  Et pourtant.

 LE MIRACLE DE LOURDES

Car le miracle, en cet espace pour le moins singulier, ne réside pas forcément dans les quelques rares guérisons reconnues après de sérieuses vérifications.

Ceux qui viennent ici le savent bien, même si leurs intentions réitérées attestent du contraire. La volonté divine, sinon les voies du Seigneur sont impénétrables.  Dont acte.

A Lourdes, les chapelles de prières : du souffle de l'Esprit Saint en passant par l'eau et la lumière.

Non, le miracle à Lourdes, c’est bien autre chose.

C’est avant tout le partage sur fond de sourires et de mains tendues. 

C’est un temps fort de réflexion en osmose spirituelle avec Celle qui, depuis plus de cent soixante années, est ici vénérée après être apparue, 18 fois  consécutives, à une pauvre et chétive jeune bergère de la campagne des Hautes Pyrénées – en France -  prénommée Bernadette. Dix-huit, un chiffre mythique associé au rite de l’eau.

Elle me dit « d’aller boire à la source » racontera Bernadette.   Un acte réel, aujourd’hui encore et réitéré tel un signe.

Mais le miracle au pluriel cette fois : ce sont aussi ces personnes de tous âges, de toutes conditions, animées de ce même besoin insoupçonné et insoupçonnable d’aller vers l’autre. Vers les autres. 

Une disponibilité sans réserve ni mesure.

Même si la culture religieuse constitue le socle de cet abandon de soi au bénéfice d’autrui et des plus malheureux dans leur chair comme dans leur esprit et leur coeur. Une sorte de mystérieux contrat nourri d’une non moins mystérieuse et insoupçonnable spiritualité, s’impose.

La première station du chemin de croix. Un site exceptionnel avec ses 15 chapelles blanches classées monument historique, surplombant le sanctuaire et ses environs. La communauté des communes du pays de Nay a engagé une première enveloppe de travaux de restauration pour une somme de 2,5 millions d'euros. Une partie du chemin de croix est achevée et bénéficie d'un éclairage nocturne qui le met en valeurde façon remarquable. 

Comme l’écrit Saint Augustin dans ses Confessions :

« Courez, je vous soutiendrai, je vous conduirai au terme, et je vous porterai là-bas. »

Le miracle de Lourdes : c’est aussi l’attitude de ceux et celles - j’en ai connu – dont la croyance en Dieu comme en Christ et plus encore en la mère de celui-ci, ne motive pas systématiquement le don de soi. L’intention suivie du geste n’en étant que plus remarquable.

Ce qui ne retire en rien à la disponibilité de celles et ceux pour lesquels la foi est aussi nécessaire que suffisante pour agir en conséquence et avec la même et ferme volonté de servir.

 

La grotte des Apparitions.

La solennité de l ‘Assomption ou Dormition (pour respecter la tradition orientale) est  traditionnellement célébrée, ce dernier 15 août, pour rappeler aux croyants que Marie a été enlevée à la vie terrestre pour entrer dans la vie en Dieu.

Dans un contexte inhabituel : une planète en surchauffe inhabituelle, un climat de guerres sournoises mais en certains lieux bien réelles, une vision tout aussi sournoisement apocalyptique. Un temps fort de questionnement existentiel.

Pour plagier la formule :  tout est important et ce n’est plus demain mais aujourd’hui qui est un autre jour.

Plus que jamais, au-delà de la compréhension différente du Mystère, Marie, la Vierge Marie pour les chrétiens de toutes sensibilités, en dehors peut-être des protestants qui l’honorent mais qui ne la vénèrent pas, apparaît en ce jour comme l’élément clé dans l’approche sinon l’espérance de l’énergie divine. 

 AIMER SANS MESURE

Aux yeux de ceux et celles qui en ces temps compliqués font des prouesses financières pour boucler leur budget, et vivre sinon survivre, la preuve en est -  cette année encore sur le site du Sanctuaire de Lourdes et devant la grotte des Apparitions, dite de Massabielle - avec ces pèlerins, venus des coins les plus reculés de la planète, vivre une rencontre mariale essentielle. Sinon vitale.

Une journée de recueillement et de réflexion que, dans un premier temps,  nous aurons aussi engagé, au matin du 15 août dans le décor autrement feutré du sanctuaire de Bétharram, chef-d’œuvre classé du 17ème siècle et caractéristique de l’art baroque, en Béarn, dans le Sud-Ouest de la France. 

En cet endroit une jeune fille aurait survécu à la notable grâce à l'intervention de la Vierge qui lui aurait tendu un rameau ... d'où le nom de Bétharam.

Situé à seulement 15 kms de Lourdes, cet autre haut-lieu de pèlerinage chrétien, antérieur à celui de Lourdes pour ce qui relève de la vénération mariale, s’est révélé, il y a plus de cinq siècles, lorsque la Vierge, dans des conditions autrement particulières est apparue,  au-dessus des eaux du Gave, le fleuve parfois impétueux qui traverse également la cité de Lourdes.

 

En effet,  alors qu’une jeune fille était sur le point de se noyer, la Vierge lui aurait tendu un rameau pour échapper au pire.

Aujourd’hui, en béarnais, beth arram signifie « beau rameau ». Étant entendu que le béarnais, endonyme ou mot indigène utilisé dans la langue du lieu, encore nommé bearnés ou biarnés, désigne l'ensemble des parlers occitano-romans du Béarn. A savoir que la linguistique ne distinguant pas le béarnais du gascon, ces parlers forment un ensemble homogène au sein du triangle Pyrénées-Atlantique-Garonne. 

Au 16ème siècle, l’abbé Hubert Charpentier ouvrit ici un hospice pour les pèlerins et les ecclésiastiques. Il fit aussi agrandir la chapelle existante et créa un monastère afin de donner naissance au sanctuaire dont le site est désormais enrichi par un exceptionnel chemin de croix, en partie superbement restauré et mis en valeur la nuit tombée.

Durant cette même période plus de 80 guérisons ont été enregistrées.

Enfin et pour respecter la rigueur historique et au demeurant religieuse, il serait injuste de ne pas citer celui qui a en quelque sorte sanctuarisé ce lieu aujourd’hui consacré : saint Michel Garicoïts.

PRISE DE CONSCIENCE

Chronologiquement, en octobre 1825, l’Evêque de Bayonne nomma Michel Garicoits à Bétharram lequel se devra de rendre régulièrement visite à ses anciennes paroissiennes, émanations physiques de l’ordre de sainte Jean-Elisabeth Bichier des Ages, à seulement 5 km de là, à Igon :

 « Mes soeurs, elles ont été plus fines que moi, leur confesseur, et sont entrées dans votre congrégation ! »confessera-t-il plus tard à sa première interlocutrice, Jeanne Elisabteh.

L'intèrieur du sanctuaire marial de Lestelle-Bétharam caractéristique avec, au-dessus du maître-autel, la sculpture d'une vierge à l'enfant, oeuvre d'Alexandre Renoir entourée des statues de Sainte Anne, de sainte Elisabeth et de saint Zacharie. D'imposantes toiles, de part et d'autre de la nef centrale, représentent des scènes bibliques et particulièrement  l'enfance du Christ. Mais également des statues en bois polychrome  et notamment une vierge à l'enfant du XIIIème siècle.

Dans ce couvent de Igon – aujourd’hui en partie transformé en maison de retraite - dont il devient vite l’aumônier, le prêtre découvre un autre visage de la vie religieuse et, peu à peu, ressent le besoin de créer une congrégation d’hommes semblable à celle des Filles de la Croix.

Celles-ci, emmenées par leur fondatrice, soeur Jeanne-Elisabeth, l’encouragent dans cette direction.

C’est ainsi qu’en 1835, naîtra, à Bétharram, la Société des Prêtres du Sacré-Coeur de Jésus.

Les premiers compagnons de leur saint fondateur, Michel Garicoïts, s’employant à prêcher dans les paroisses. Premier acte.

Deux ans plus tard, le Père Michel Garicoïts, ayant beaucoup appris de la communauté de Igon, décide de créer à son tour une école. Il est notamment encouragé dans ce projet par la fondatrice des Filles de la Croix qui recommande à ses soeurs de trouver des garçons pour l’école de Bétharram.

La belle aventure d’Igon et de Bétharram, des Filles de la Croix et des Religieux du Sacré-Coeur de Jésus, prend forme. Et connaîtra vite des lendemains qui chantent. Une efficace complémentarité.

Aujourd’hui le message perdure. Selon les circonstances et les impératifs. Le temps sont autres, certes,  mais le message est toujours et plus encore d’actualité.

En 1847, Michel Garicoïts à une question d’une éducatrice des Filles de la Croix répondait :

« Vous me demandez un mot sur la manière de se faire craindre et aimer; disons plutôt sur la manière de se faire aimer et respecter. Oui. ma chère Soeur : affection respectueuse, amour respectueux : que ne dit pas ce mot ? L’amour respectueux dont je vous parle, tenant le milieu entre le faux et souvent criminel amour mondain, et l’hérétique et cruelle charité des jansénistes, infiniment éloigne de l’un et de l’autre, est un sentiment précieux aux yeux de la foi et de la raison. »

Aujourd’hui et pour nous, une prise de conscience spirituelle avant de gagner cette fois  le site du sanctuaire de Lourdes pour y conclure, dans une ambiance spirituellement plus festive, pourrait-on dire, ce temps de réflexion et de prière sur le thème de la paix et de l’amour dans le monde, celui que pourrait encore  nous inspirer Saint-Augustin qui estimait :

«  La mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure. »  

 

 Bernard VADON 

 

 

Rédigé par Bernard Vadon

Publié dans #J - 2 - B ( Journal )

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