DANS L’ESPRIT SPIRITUELLEMENT INSPIRANT DE LA CONSTITUTION APOSTOLIQUE « PRAEDICATE EVANGELIUM » LES ÉVÊQUES FLAMANDS S’IMPLIQUENT POUR LE MIEUX ÊTRE EN ÉGLISE DES COMMUNAUTÉS HOMOSEXUELLES. ECLAIRAGE.

Publié le 15 Novembre 2022

Le pape François discerne ce qui importe : la fraternité à l’égard des personnes homosexuelles. Un air frais évangélique semble circuler de nouveau en écho à la parole de Jésus dans le « Sermon sur la montagne » : « Ne jugez pas afin de n’être pas jugés » (Mt 7,1).

C’est aussi un avertissement adressé aux scribes et aux pharisiens de nos églises : méfions-nous, non pas de la morale, mais d’un certain moralisme qui s’empresse de juger et de condamner une personne à partir de son comportement sexuel. Un avertissement qui par les temps qui vont ne s'adresse pas seulement à l'Église mais dans l'a société dans sa globalité.

QUI SUIS-JE ?

Souvenons-nous. C’était en 2013. Le pape François commençait de nous habituer à des conférences de presse la plupart improvisées et données pourrait-on dire traditionnellement dans les avions qui le ramenaient de ses  visites pastorales dans des pays plus ou moins éloignés de la place Saint-Pierre.

En présence d’une assistance généralement issue des médias internationaux, il se prêtait alors, et de bonne grâce, au jeu des questions-réponses.

Un exercice pas forcément compliqué mais qui demande une relative maîtrise de soi face à un public professionnellement curieux et soucieux de porter sinon la bonne nouvelle en tout cas l’information exclusive. Sinon l’estocade. Un régal pour les professionnels de l’information.

Rien à voir avec. la catéchèse des jours de grande audience dans la salle Paul VI du Vatican.

Là, c’est du chaud. Et parfois du très chaud.

Pas de quoi cependant troubler le successeur de Saint Pierre qui en a vu d’autres et dont la formation au sein de la communauté jésuite a habitué au pire. Dans le droit fil de la spiritualité enseignée par Saint Ignace de Loyola.

Il s’y ajoute pour le pape François la difficile mais belle doctrine de l’ordre des franciscains.

En 2013 justement, la question a fusé sans préambule quant à connaître la position de la communauté homosexuelle au sein de l’Église en général et catholique en particulier.

La question piège par excellence posée à un homme qui a fait du respect de l’autre une règle que l’on ne transgresse pas.

La réponse à la question fut alors aussi directe que sans ambiguïté :

«  Qui suis-je pour juger ? »   

Tout est dit. Ou presque.

LE PLAN DE DIEU

Qu’importe au fond la doctrine qui, au fil du temps, peut être soumise à discussion sinon à assouplissement.

Alors que d’aucuns assurent – quelle prétention ! – que l’homosexualité est « intrinsèquement désordonnée » et, comble de la suffisance de ses instigateurs :

« Qu’elle n’entre pas dans le plan de Dieu. »

Quel étrange discours que de définir ainsi « le plan de Dieu. » !

Tout récemment encore, François, ce pape improbable certes mais profondément humain pour ne pas dire humaniste, c’était en avril dernier, dans la continuité de la période trouble des abus sexuels et singulièrement au sein de l’Église, confiait à l’une des victimes chiliennes d’un prêtre condamné pour abus sexuels :

« Juan Carlos, que tu sois gay, ça m’est égal. Dieu t’a fait ainsi et t’aime ainsi et à moi ça m’est égal. Tu dois être heureux d’être comme tu es ».

D’aucuns – suivez mon regard – s’étonneront de ce que le pape n’ait pas mis sa crosse en bataille afin de pourfendre ces détraqués mentaux.

Pire : la référence trompeuse, suite à une mauvaise interprétation du mot qui tue, celui de « psychiatrie » que le pape aurait prononcé en forme d’explication   malencontreuse tombait comme du pain béni  pour  ceux qui vouent systématiquement aux gémonies ces êtres infréquentables que sont les homosexuel. Notamment.

C’était le 26 août dernier dans l’avion qui  cette fois le ramenait  d’Irlande. Dans sa réflexion, François a lâché le mot qui en la circonstance révulse :

« il n’avait pas le moins du monde l’intention de dire qu’il s’agissait d’une maladie psychiatrique, mais que peut-être il fallait voir comment sont les choses au plan psychologique. » rectifie à juste raison l’entourage.

En effet, par « psychiatrie », il ne faut systématiquement  pas comprendre une incitation à essayer de « soigner » son enfant dans le but d’en faire un hétérosexuel comme certaines « thérapies » se réclamant du christianisme affirment pouvoir le faire.

Hérésie totale.

Plus simplement, sinon plus humainement, le pape a évoqué une possible réflexion permettant de discerner un éventuel mal-être chez des enfants se découvrant homosexuels. Point barre !

Au demeurant cependant une réflexion qui ne pouvait pas manquer de mettre en joie les tenants d’une morale étriquée et janséniste, particulièrement opposée à celle  de la Compagnie de Jésus ( en l’occurrence les jésuites).

Les jansénistes affirmant :

« La grâce du salut serait accordé par Dieu aux Hommes indépendamment de leurs mérites, niant ainsi la liberté humaine au profit d’une prédestination divine ».

Au nom de ce déni dans lequel il est passé maître en bien des domaines, le gouvernement français – entre autres -  (mais de quoi je me mêle encore ) par la voix de la cheffe patentée des redresseurs de tort, Marlène Schiappa, a signifié son « incompréhension face à des propos indéfendables. » (sic)

 Bigre !

Une tempête dans un verre d’eau dans lequel est allé se noyer innocemment la communauté LGBT alors même que (rapporte un média) je cite :

« Le chef de l’Église catholique a tenu le plus naturellement du monde ces propos en réponse à un journaliste qui lui demandait ce que pouvait dire un père catholique à son fils lorsqu’il apprend que celui-ci est homosexuel. »

Et le pontife de répondre :

 « Je lui dirais premièrement de prier, de ne pas condamner, dialoguer, comprendre, donner une place au fils ou à la fille, donner une place pour qu’il s’exprime. »

Où est le problème ?

INDENIABLE ÉVOLUTION

Plus intéressante et constructive est la récente démarche pastorale d’accueil - sans rien retrancher de l’enseignement moral de l’Église – des évêques flamands et cela, sous la forme d’une prière spécifique à l’intention des couples homosexuels.

Avec cette remarque essentielle et dans le droit fil de l’enseignement évangélique et pour lesquels, je cite encore :

« L’amour entre deux individus de même sexe nous dit quelque chose de l’amour du Seigneur. »

Pour le Père Vincent Leclercq, théologien et prêtre assomptionniste :

« Le texte des évêques flamands insiste sur la reconnaissance et le soutien des personnes homosexuelles, celles qui font le choix courageux du célibat dans la chasteté mais aussi celles vivant en couple. Les évêques offrent à ce titre une prière pour demander à Dieu de bénir et de perpétuer cet engagement d’amour et de fidélité ».

Ne nous y trompons cependant pas, recommande le théologien, leur déclaration ne crée pas un nouveau débat dans la mesure où l’homosexualité est une question déjà âprement discutée et pas seulement parmi les catholiques. Ils nous proposent une première en matière de pratique et d’accompagnement pastoral.

Et le père Leclercq d’ajouter que la prière proposée réoriente la question sur ce que vivent ces couples et non plus seulement sur ce qu’enseigne l’Église :

« Elle met surtout l’accent sur le besoin de mettre tout en œuvre, jour après jour, pour le bonheur de l’autre ».

De son côté, la communauté chrétienne est invitée à prier pour que la grâce de Dieu puisse agir en eux mais aussi à travers eux là où ils vivent, servent leurs frères et sœurs et pratiquent leur foi. N’oublions pas qu’il n’est jamais facile d’assumer ouvertement son homosexualité, même aujourd’hui et même en Belgique.

Quant aux membres du conseil d’administration de l’association « Devenir Un en Christ » représentés par Jean-Philippe Cavroy et Timothée de Montgolfier, la publication par les évêques flamands d’une prière spécifique pour les couples homosexuels s’inscrit dans une « indéniable évolution » de l’Église dans son accueil des croyants homosexuels.
 

Le texte des évêques flamands insiste en effet sur la reconnaissance et le soutien des personnes homosexuelles, celles qui font le choix courageux du célibat dans la chasteté mais également celles vivant en couple.

Clairement, les évêques ont élaboré une prière :

« Pour demander à Dieu de bénir et de perpétuer cet engagement d’amour et de fidélité ».

Laissant volontairement de côté les formules d’interdiction ou de jugement négatif, ils proposent une pastorale « essentiellement axée sur la rencontre et le partage ».

Certaines personnes homosexuelles ne peuvent ou ne veulent pas embrasser le célibat. Aussi, pour vivre le mieux possible une orientation sexuelle qu’elles n’ont pas choisie et vivre dignement leur sexualité, la vie en couple leur semble le meilleur choix possible ; souvent après bien des difficultés surmontées avec courage.

La vie morale consiste alors et pour chaque individu à rechercher le bien et à éviter le mal.

De nombreux catholiques pensent aujourd’hui que l’homosexualité est normale.

Par choix personnel et moins discriminatoire, je dirais plus précisément naturelle.

En ce sens, elle n’est pas une maladie à laquelle il faudrait remédier ou encore un handicap sinon un échec dans l’éducation ou le développement des personnes fidèles à l’enseignement de l’Église.

A ce titre, les évêques flamands rappellent implicitement qu’elle n’est pas normative, ni équivalente à l’hétérosexualité.

Leur prière de bénédiction est à ce titre soigneusement distinguée du mariage sacramentel et n’est pas célébrée pendant la messe.

Est-ce finalement si important ?

PROXIMITÉ ET COMMUNION

« Ce que le rituel fait, les discours n’ont plus à le faire. Et ceci est précieux lorsque les paroles sont encore ressenties comme une offense et que l’évaluation morale de l’Église apparaît comme un jugement ou même l’exclusion de fait des personnes concernées, de ceux qui les accompagnent et de leurs familles. »

La proposition des évêques flamands est manifestement quelque chose de nouveau sans rien retrancher de l’enseignement moral de l’Église ni compromettre la norme.

Elle insiste sur la proximité et la communion entre les membres d’une seule et même Église.» considère l’association « Devenir Un en Christ ».

Et de préciser :

« Certains penseront que les évêques signataires adoptent une position nouvelle de manière incompréhensible ou que l’Église cède aux demandes sociétales de manière inadmissible. Bien au contraire, dans l’esprit des évêques flamands, l’Église cherche une manière de demeurer fidèle à ce qu’elle est dans un monde qui change à toute vitesse. Elle s’efforce d’apprendre de cette humanité que le Christ désire rassembler tout en sachant que nos parents ou grands-parents ne pouvaient pas savoir ce que nous savons aujourd’hui. La question est plus pratique que théorique : comment se comporter de manière responsable face à la visibilité inédite – y compris sur le plan des institutions sociales – d’une homosexualité jadis occultée ou refoulée mais aujourd’hui mise en pleine lumière ? ».

« Notre association a une voix à porter en tant que témoin de la fécondité réelle et incarnée de l’union fidèle des personnes homosexuelles. Aujourd’hui, nous voulons simplement rendre grâce à Dieu parce que des évêques de l’Église universelle, successeurs des apôtres, confirment que l’amour que se portent deux individus de même sexe nous dit quelque chose de l’amour du Seigneur et que, si cet amour n’est peut-être pas du même ordre que celui des époux sanctifiés dans le mariage, il peut être porteur de beaux fruits, source de réjouissance pour l’Église, et mériter que l’on en dise du bien. » assurent encore les responsables de l’association « Devenir Un en Christ »

REJET DE L’EXCLUSION

La déclaration des évêques prend certes le risque de l’individualisation et celui de se démarquer d’une position communautaire. Il y a donc un danger pour l’unité du magistère mais ce risque apparaît calculé.

Proposer une forme liturgique pour demander à Dieu de bénir un engagement d’amour et de fidélité, écarte toute tentation à l’individualisme et au relativisme.

Par ailleurs, pour les responsables de l’association « Devenir Un dans le Christ », le ton de cette déclaration n’est pas celui du triomphalisme d’une communauté LGBT qui assiégerait les parvis des églises après avoir franchi la porte des mairies de nombreux pays européens. Il est plutôt celui de l’action de grâce et de la promesse.

A ce titre, il confie au Seigneur ce qui constitue le don de soi à l’autre, une manière exclusive et exigeante d’aimer et que la Bible bénît déjà.

Les paroles de la prière proposée invitent donc les deux personnes à prononcer devant Lui un engagement qui résonne en nous : 

« Nous avons confiance en Ta proximité, et donnés l’un à l’autre pour toujours, nous voulons vivre de ta Parole. »

Et la communauté d’enchaîner :

« Pour que la grâce de Dieu agisse en eux, pour qu’ils prennent soin l’un de l’autre et pour la communauté élargie dans laquelle ils vivent ».

Comment ne pas se réjouir de cette belle et saine initiative en forme de rejet de l’exclusion systématique et stérile au bénéfice d’un engagement profondément chrétien.

 

Bernard VADON

 

Rappel évangélique

Au trente-et-unième dimanche ordinaire l’évangile de Jésus-Christ  selon Saint Luc et l’invitation de Jésus lancée à Zachée, le riche collecteur d’impôts à la solde des romains est riche de significations existentielles :

« Zachée, descends vite, aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »

 Les reproches des disciples ne se feront pas attendre quant au souhait du Christ de loger chez un pécheur ou présumé tel.

L’explication de Jésus est à l’inverse riche de sens :

« Le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »

Ou comme je l’écris précédemment : présumé tel.

Une démarche qui ,dans un certain sens ( ou esprit ) , rejoint l’initiative des évêques flamands à l’égard non pas forcément de pécheurs mais de personnes non grata au sein d’une communauté qui n’a pas été exclue du « plan de Dieu ». N’en déplaise à certains rigoristes.

Certes, avec des formes sinon des réserves formulées dans un premier temps, les évêques flamands ont manifestement – qu’ils en soient loués – trouvé l’inspiration dans ce fameux Praedicate Evangelium, une spiritualité nourrie à la source dans l’amour de Dieu  et qui nous rappelle que notre devoir est, à l’imitation du Christ, de servir nos frères et sœurs, en particulier ceux qui sont le plus dans le besoin … matériel mais aussi et surtout en la circonstance, moral.

En clair et je cite :

« Promouvoir la personne humaine et sa dignité donnée par Dieu, les droits de l’homme, la santé, la justice et la paix dans tous les domaines de la vie publique et sociale ».

Précisons encore qu’après cinq ans d’expérience le Dicastère pour le service du développement humain intégral a été sous l’autorité éclairée du Saint Père actuel reconfiguré et renouvelé dans sa mission à la lumière de la nouvelle Constitution apostolique « Preadicate Evangelium ».

 

 

Rédigé par Bernard Vadon

Publié dans #J - 2 - B ( Journal )

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :