ITE MISSA EST … ou quand Kafka s’invite au banquet gouvernemental !

Publié le 16 Novembre 2020

Chez les chrétiens l'espérance n'est pas vain mot ...

Dans sa lettre à Louise Colet Gustave Flaubert écrivait:

« J’aime les gens tranchants et énergumènes, on ne fait rien sans le fanatisme. Le fanatisme est la religion, et les philosophes du XVIIIe siècle, en criant après l’un, renversaient l’autre. Le fanatisme est la foi, la foi même, la foi ardente, celle qui fait des œuvres et agit. La religion est une conception variable, une affaire d’invention humaine, une idée enfin; l’autre un sentiment. »

Jamais ô grand jamais je ne taxerai de fanatiques ceux qui, en prière, devant les églises fermées pour raison de pandémie, invoquent pacifiquement l’autorité de leur ouvrir les portes.

Au demeurant, je préfère la pensée voltairienne qui condamne le fanatisme ignorant les lois et corrompant les religions.

Dans son dictionnaire philosophique, Voltaire s’en réfère d’ailleurs à la métaphore de la maladie expliquant qu’il n’y a de remède à cette maladie épidémique (le fanatisme) que l’esprit philosophique, lequel, répandu de proche en proche, adoucit enfin les moeurs des hommes, et prévient les accès du mal; car, dès que ce mal fait des progrès  il faut fuir et attendre que l’air soit purifié.

Les lois et la religion ne suffisent pas contre la peste des âmes et la religion, loin d’être pour elles un aliment salutaire, se tourne en poison dans les cerveaux infectés.

Voltaire considérant  à ce titre que la sainte religion serait celle qui enseignerait l’adoration d’un Dieu,  la justice, la tolérance et l’humanité. Nous adhérons bien. évidemment.

TENEZ BON !

De là, et dans le contexte singulier actuel né à la faveur d’une pandémie aussi destructrice qu’inopportune par les temps qui courent, en considérant  - selon le frère dominicain Adrien Candiard,  spécialiste en théologie musulmane - le fanatisme non pas comme une déviance sociale ou psychologique mais comme une erreur religieuse, il n’y avait qu’un pas que d’aucuns ont fait face à la réaction épidermique des catholiques – enfin d’une proportion non négligeable de pratiquants – peut-être inspirés par le courage de Saint Paul les exhortant par la voix de Pierre Durieux  ( auteur entre autres de « Les clés du Royaume sont sous le paillasson » à tenir bon.

Je cite cette paraphrase :

« Tenez bon, tenez ferme dans l’attente du prochain repas du Seigneur. (s’entend l’eucharistie dont les pratiquants sont privés) .

« Continuez à exprimer que vous en avez besoin ! Car votre faim de ce jour est aussi un témoignage. Dans l’invraisemblable débat sur les biens « essentiels » ou non, dites et redites que s’il n’y avait qu’un Bien absolument essentiel, même s’il ne se voit pas (2 Co 4, 18), c’est ici, c’est le Royaume, et c’est la messe ! Que votre chemin de Damas vous donne, comme moi, d’ouvrir les yeux ! Je me répète, mais si vous vous sentez faibles… c’est alors que vous êtes forts (2 Co 12, 10) ! »

Dont acte.

IMPÉNÉTRABLES

Le ministre de l’intérieur et des cultes – que l’on classerait plutôt parmi les catholiques traditionnalistes sinon intégristes (source du Canard Enchaîné) -  face à l’irae des croyants privés de messes devrait souhaiter l’apaisement – sentiment certes légitime qui cependant ne retire en rien à l’absurdité ( une sottise de plus à l’actif du Premier Ministre alias Monsieur confinement qui doit rencontrer les représentants des cultes) de cette mesure sans raison sérieuse sinon celle de semer la discorde jusque dans les rangs du bon peuple de Dieu où l’unanimité ne se fait pas en dépit d’un président élu de l’assemblée épiscopale – Mgr Eric de Moulins-Beaufort – particulièrement déterminé à reprendre la main dans cette affaire délicate et exaspérante.

Tenez bon, tenez ferme !

Il n’empêche que les voies gouvernementales sont impénétrables à l’image, mais loin d’en souffrir la comparaison, de celles du Seigneur.

Dans son  ordonnance du  samedi 7 novembre dernier, le Conseil d’État avait rejeté les recours contestant l’interdiction des offices religieux publics compte tenu du reconfinement et de la situation sanitaire. Il s’exprimait également sur d’autres sujets touchant à la liberté de culte.

Quant aux recours déposés notamment par les évêques Français, il en était résulté que les messes resteraient interdites. La liberté de culte reposant sur une appréciation  subjective.

En effet, si le Conseil d’État rappelle « que la liberté de culte est une liberté fondamentale », elle doit être « conciliée avec l’impératif de protection de la santé ». Or, le juge relève que « la circulation du virus sur le territoire métropolitain s’est fortement amplifiée au cours des dernières semaines malgré les mesures déjà prises, et que les motifs de rassemblement autres que scolaires et professionnels ont par conséquent dû être limités ».

S’agissant des lieux de cultes en particulier, le juge des référés constate que le risque de contamination n’y est pas écarté. Alors, pourquoi pas une attestation pour aller à l’église ?

C’était en effet l’un des points soulevés par les requérants.

Alors que les lieux de cultes restent ouverts et que chacun peut s’y rendre pour la pratique individuelle, la case à cocher sur l’attestation de déplacement n’était jusqu’à présent pas claire. Vous avez dit ubuesque ?

Ainsi, des fidèles qui se rendaient à l’église pour prier ont d’ailleurs reçu une amende. Et pour faire bonne mesure le ministre de l’Intérieur a brandi le spectre guerrier cher à Georges Clémenceau et à sa fameuse formule de la Sainte Alliance du sabre et du goupillon, l’attelage luttant contre le matérialisme athée du marxisme-léninisme comme l’écrit  Michel Onfray et qui pour le ministre de l’Intérieur pourrait se résumer selon l’expression familière,  à quelques « prunes » à 135 euros !

Pour commencer,  car on connait la suite possible en cas de récidive.

A moins que conformément aux suggestions du Conseil d’État, les fidèles puissent se déplacer dans le lieu de culte le plus proche de leur domicile ou situé dans un périmètre raisonnable autour de celui-ci en cochant, en l’état du modèle-type de justificatif (si toutefois ce dernier est mieux explicité) la case motif familial impérieux..

On nage en plein Kafka !

Une attestation de déplacement certes, mais pour quel motif s’il s’agit d’un office religieux ?

Les anciens de l’ENA doivent y perdre leur latin … que la plupart n’ont d’ailleurs jamais pratiqué.
 

MAUVAISE FOI !

Quant aux mariages, c’est encore une autre histoire.
Autorisés jusqu’à 6 personnes bien que lors de l’audience devant le Conseil d’État la représentante du gouvernement ait déclaré au Président qui l’interrogeait sur la tenue possible ou non des mariages, a répondu qu’elle n’en savait rien ! Tout en affirmant, dans un second temps de questionnement,  que les mariages civils étaient autorisés, mais pas les mariages religieux.

Non vous ne rêvez pas..

Le juge des référés aurait alors tranché :

« Les cérémonies religieuses pour les mariages doivent être regardées, même si les dispositions gagneraient à être explicitées, comme n’étant pas interdites dans les lieux de culte, dans la limite de six personnes, ainsi que l’a expressément indiqué le Premier ministre lors de sa conférence de presse du 28 octobre 2020. ». (sic)

Considérant que la coupe n’était pas encore suffisamment pleine, le Conseil d’État a souligné la nécessité de renforcer les protocoles sanitaires dans les églises. Une mauvaise …  foi manifeste et un manque total de visibilité de la part de ces « administratifs » pour beaucoup ignorants et se bornant à des prises de positions théoriques. Sans visibilité sérieuse.Totalement déconnectés de la réalité.

Il est intellectuellement malhonnête d’affirmer que les protocoles ne sont pas strictement appliqués ...

En effet,  dès le début de la pandémie l’Église de France a mis en place une série de mesures afin de limiter la propagation du virus (de la distanciation, au port du masque en passant par le gel hydro-alcoolique). Aussi, est-il intellectuellement malhonnête d’affirmer que les protocoles ne sont pas strictement appliqués.. En particulier, pour ce qui est de la distanciation entre les fidèles, y compris à l’entrée et à la sortie des lieux de culte. Quant au port du masque par les officiants et l’application du gel plusieurs fois durant l’office nous avons maintes fois pu le constater en qualité de fidèles.

Dans son brûlot « « Les Puissances du Mal) Jean-Edern Hallier dissertait en ces termes sur la bêtise :

« La stupéfiante bêtise des politiciens  m’a toujours ravi. Aucune espérance ! Pas le moindre souffle de l’esprit ! La civilisation française n’est plus qu’un souvenir écrasant. »

Bernard VADON