SYLVIE BAUCHE : quand passion rime avec vocation ou voyage initiatique sous le signe du Nil.

Publié le 7 Juillet 2020

« Je relève d'un pays où personne ne règne. Un pays sans fanion, sans amarres. Le Nil à mes yeux contient tous les fleuves, c'est lui qui coule dans mes veines. C'est en Égypte que j'ai grandi, mais c'est en français que j'ai fait mes études. Cette langue est ma chair, et je n'éprouve rien, par le sentiment ou par le geste, qui ne passe par elle. Entre l'Égypte de ma jeunesse, le Liban de mes aïeux et la France de mes toujours, une sorte d'alliance très libre s'est peu à peu fait jour, par dépouillements successifs. » confiait dans l’un de ses livres ( « Le Message ») Andrée Chedid pour qui la nécessité de l’amour et la puissance de la vie étaient essentielles dans toute existence. 

Légende : Rencontrer la culture, c’est rencontrer l’autre, c’est nouer une relation ...

 

EMPREINTE HUMANITAIRE

 

Sylvie Bauche, après avoir exercé la fonction passionnante de médiatrice culturelle et scolaire, spécialiste de l’Égypte antique et copte ; puis, collaboratrice auprès du service pédagogique du CSA du Caire, s’est employée avec une curiosité sans cesse aiguisée, à relater ses expériences professionnelles et les moments d’exception d’un parcours de vie enrichi d’échanges fraternels sur les deux rives de la Méditerranée. En Égypte mais aussi au Maroc.

Elle a également apporté son soutien aux personnels de musée, d’établissements scolaires, et en milieu associatifs où elle a enseigné l’Égyptologie en milieu rural français dont l’Université du temps libre de Tarbes. Il convient d’ajouter à cette belle feuille de route les visites de musée et l’accompagnement de voyages culturels (Agences Oriensce et  Rêve Vacances). 

Alliant son travail culturel à l’apprentissage scolaire, elle vient aussi en aide à des enfants en difficulté et démontre l’importance de la culture auprès d’animateurs chargés de personnes handicapées issues du monde arabe. Elle est souvent sollicitée pour donner des conférences et former des animateurs en médiation culturelle. Son expérience  a été accueillie au Maroc où elle a vécu huit années se rapprochant de la communauté Franciscaine de Marrakech notamment dans l’échange et le partage avec les musulmans dont elle garde une forte empreinte humanitaire. 

Enfin, après la sortie de son premier livre, en 2009, elle a été nommée ambassadrice de la culture égyptienne sous l’égide de l’Institut d’Égypte à Paris. (1)

 

Légende : Coup de cœur assuré pour Sylvie et Guy (aujourd’hui disparu)  avec ce voyage de noces qui les emmènera au plus loin de leurs rêves puisque la passion ne les quittera jamais plus. Aujourd’hui, nul n’est absent en ma demeure, l’Égypte est là, partout me rappelant avec quelle force nous l’avons aimée tous deux du plus profond de nos âmes.  

 

Un peu comme si Hypatie d’Alexandrie - la célèbre platonicienne et mathématicienne grecque - lui avait communiqué cette énergie singulière dont tous ceux qui se sont, comme nous, laissé ensorceler au sens noble et intense du terme par l’Égypte ancienne, se reconnaissent :

 

« Savoir, vouloir, oser, se taire sont les quatre piliers de la sagesse de l’Ancienne Égypte qui aura permis à l’homme de s’élever du monde d’en bas au monde d’en haut sur plusieurs millénaires. » préconisait la philosophe grecque.

VOYAGE INITIATIQUE

Le dernier roman (« La lampe cachée du Nil ») de Sylvie Bauche est une sorte de continuité de « Carnets de route » présentés sur Radio Présence à Lourdes, en 2009, et dans lesquels elle relate les conséquences de l’exil de la Sainte Famille qui trouve encore aujourd’hui un écho émotionnel auprès du peuple égyptien particulièrement sensible à l’accueil de l’étranger et au respect de la famille. 

« La lampe cachée du Nil » est un voyage initiatique et découverte, écrit avec cette même  originalité que l’on retrouve chez Andrée Chedid, l’auteure, notamment de « La cité fertile » ou « Le sixième jour » et qui définissait sa poésie comme « un lyrisme aux bords d’une crête qui pencherait vers la sensibilité plutôt que vers l’intellect ».

René Char et Aimé Césaire sont un peu – modestement, dira Sylvie Bauche visiblement troublée par ce rapprochement littéraire - leurs compagnons de route.

Un texte riche de descriptions de lieux et d’évènements réels où la nature reprend ses droits sur une humanité qui garde précieusement allumée les lampes du cœur de ceux qui se sont élevés du monde d’en bas au monde d’en haut. 

Une histoire qui avait commencé, il y a bien longtemps, par le calame du scribe de pharaon marquant à tout jamais la culture judéo-chrétienne s’ouvrant à celle de l’Islam. 

Une histoire qui fait encore référence à Hypatie d’Alexandrie pour laquelle la vie est effectivement un déploiement et que plus nous voyageons, plus de vérités nous saurons comprendre et comprendre que ce qui est à notre porte est la meilleure préparation pour comprendre celles qui se trouvent au-delà. 

Légende : un voyage initiatique et découverte

Illustration : 

« Parti des hauts plateaux d’Abyssinie, Aynalem se sentit si heureux de voir enfin la ville sainte d’Aksoum. Il eut l’impression d’accéder au grand déballage à ciel ouvert d’un inventaire archéologique depuis la création de l’homme. En ce début du XIIIe siècle, ce descendant du mage Balthazar est en quête d’une vérité cachée dans la vallée du Nil. Comment découvrir ce papyrus laissé par Joseph, le père d’une famille d’exilés racontant leur vie quotidienne en ces contrées aux noms encore mystérieux résonnants de légendes et de mythes ? »

Ainsi, guidé par sa curiosité d’apprendre et son instinct de survie face au danger qui le menace, « l’œil du monde », tel que les mages le surnomment, Aynalem le héros du roman de Sylvie Bauche se laissera guidé par les lampes restées allumées des scribes, prophètes, moines, anachorètes, soufis, paysans, gardiens de tombe, anges, marins, gouverneurs, militaires et autres croisés, tout en affrontant les monstres antiques, ceux du désert et toutes sortes de trafiquants. 

Sur des chemins colorés d’Éthiopie, de Palestine et d’Égypte, Sylvie Bauche s’offre, sans modération, la liberté de laisser s’exprimer les diversités culturelles, politiques et religieuses de ces terres sacrées tout en ouvrant des pistes à des questions toujours d’actualité dont la place que nous devrions toujours être prêts à proposer aux étrangers en exil, celle de l’héritage de nos croyances en un Dieu unique, mais aussi en la considération qu’évoque le mot famille :

 

Sylvie Bauche : un témoignage à la vie universelle et fraternelle.

 

« Pour moi, la lampe cachée du Nil est l’histoire d’un long cheminement. D’abord, celui de ma Foi qui a subi un électrochoc lors de ma première visite en 1992 au monastère St Macaire ,au Wadi Natroun où un événement m’a transformé. Appelons cela, un signe. Puis, il y a eu cette rencontre à Louxor dans une pharmacie avec le « Vous me cherchez, je suis là »  d’un personnage hors du commun, le Père Gabriel Azer.

C’était en 1993, j’étais absorbée par l’écriture de l’histoire d’une jeune fille nubienne convertie au christianisme après la fermeture du temple d’Isis, à Philae. Nous sommes alors partis nous réfugier sur l’autre rive où soutenue par ma foi en Marie je me suis nourrie du désert, ce jardin du pardon mais aussi de la fraternité paroissiale. Cependant ce besoin sinon cette nécessité d’écrire sur l’Égypte s’affirmait plus encore. Il y a quelques années, après avoir repris ma vie professionnelle d’égyptologue, j’ai donné des conférences sur les « Chrétiens d’Orient », le monachisme, et participé à douze émissions sur le voyage de la Sainte Famille en Égypte invitée par Germain Maps sur Radio Présence à Lourdes. C’est alors qu’une question commençait à m’obséder relative aux conséquences du massacre des Innocents vu par les familles des mages. J’avais mis en page les émissions radio mais cela semblait trop « scolaire » selon mon fils Chephren. Par contre, j’avais composé un chapitre en laissant Joseph s’exprimer directement sur leur vie quotidienne de réfugiés. Aussi, entre mon travail avec les enfants en difficulté scolaire, les soins à mon époux alors paralysé, mes tâches ménagères et de jardinage sans compter avec les études de mon fils,  je me suis mise à écrire composant ainsi ce roman vécu puisque les lieux et les événements historiques décrits sont réels ainsi que certains personnages. Le héros et conteur est un jeune abyssin descendant de Balthazar se rendant dans une Égypte du début du XIII siècle, époque peu connue. Un long et méticuleux travail de recherche archéologique et historique a été nécessaire. L’intérêt de cette aventure résidait pour moi dans les rencontres faites par mon héros afin que le lecteur puisse le plus facilement et naturellement qui soit se transposer sur le mode de pensée de l’ancienne civilisation, d’envisager l’éducation anachorétique reçue par les Coptes, d’apprécier la vie quotidienne et familiale des fellahs et apprendre comment, en ces années 1215, l’administration gérait les problèmes majeurs de l’eau potable ou de la douane alors que le pays était surveillé par les Croisés et bien d’autres événements en des lieux peu connus que j’ai pris plaisir à décrire en agrémentant le récit d’anecdotes. Ainsi, par la magie d’un papyrus retrouvé je donne la parole à une famille de réfugiés dans un pays qui n’a de cesse d’évoluer tout en gardant les lampes allumées de ceux qui étaient en bas et désirent s’élever. Agrémenté de citations de la Bible, du Coran ou des textes de l’Égypte antique, ce livre est en soi un témoignage à la vie fraternelle et universelle. » explique Sylvie Bauche.

Pour cette dernière, rencontrer la culture, c’est rencontrer l’autre, c’est nouer une relation. Et par cette étrange alchimie la relation est un langage universel qui nous rapproche car il interpelle notre corps, nos sens voire notre âme : 

« Si la culture s’apprivoise, on ne se l’approprie pas. Elle reste neutre et universelle. C’est là tout son charme parfois envoûtant, mystérieux, énigmatique. »

Légende : Au mot Égypte, les sens se mettent en éveil pour parvenir les premiers avant que notre imagination s’en mêle.  

SOUVENIR     

Par magie, au terme de cette rencontre avec Sylvie Bauche un de mes souvenirs journalistiques en Egypte brouille agréablement mes pensées …

Flash-back :

 ... Et cela, alors que le petit matin s’installe en léger brouillard s’effilochant au-dessus du Nil où quelques pêcheurs relèvent leurs filets. Dans le concert des avertisseurs qui s’est à peine calmé aux dernières heures de la nuit le jour vient à la rencontre de la nuit. Insensiblement et difficilement perceptible. Avec, cependant, un léger avantage sur ces aurores proche-orientales qui n’en finissent plus de passer par la palette nuancée et colorée du levant.

      Dans le périmètre du marché Khalili avec seulement quelques piastres on peut accompagner son thé ou son café du fruit sacré de Thot, le dieu de la sagesse ou encore d’un petit pain rond et creux, garni de foul mdammis, don de Dieu disent les égyptiens, cette crème brune et onctueuse obtenue en faisant cuire une nuit entière des fèves assaisonnées 

      L’Histoire est ici partout présente. Je dirais omniprésente.

      Notamment, lorsqu’on remonte le Nil jusqu’en Haute Égypte sur la route de Luxor, capitale de l’ancienne Égypte, ville sacrée de la trinité thébaine divine symbolisée par Amon, le roi des dieux, Mot, son épouse et leur fils Khonsu, dieu lunaire.

      En filigrane, les vestiges impressionnants des temples de Luxor et de Karnak témoignent de la grandeur et de la magnificence de cette civilisation mystérieusement ressuscitée les nuits de pleine lune.

A quelques encablures de l’autre côté du Nil, sur la rive ouest, s’ouvrent les vallées des rois et des reines de la XVIIIème dynastie. On y découvre la tombe de Tout An Khamon, à une montagne de sable du temple funéraire de Deir El Bahari que la reine Hatshepsout a immortalisé. Pour y accéder il faut emprunter le bac avant de suivre une route poussiéreuse longeant d’immenses champs de cannes à sucre et de blé que dominent les fameux colosses de Mennon.

      Après Luxor, Assouan écrasée sous le soleil de plomb du désert, est un endroit particulièrement serein et reposant. L’imposant mausolée de l’Aga Kahn domine l’île Eléphantine, où les jeunes nubiens issus de cette race noble et adulée sont élevés dans le respect de la tradition, et l’île Kitchener sorte de jardin extraordinaire où poussent en ordre dispersé les plus rares essences tropicales et asiatiques. A seulement quelques kilomètres du temple de Philae, d’époque ptolémaïque, associé au même destin heureux que celui du temple funéraire de Ramsès II, à Abu Simbel.

      Les voiles blanches des felouques, tels de grands et gracieux volatiles, se fondent dans la nuit qui tombe doucement sur les contreforts du désert de Nubie. Un paysage d’exception où, sur fond de granit rose, se profile le destin du Proche-Orient et de l’Égypte.

      La plume d’André Malraux en donnait la quintessence spirituelle :

     « Funéraire, l’art égyptien est rarement funéraire. Il ne tente pas de fixer ce qui fut comme les bustes romains : il fait accéder le mort à l’éternel … Il crée les formes qui accordent celles de la terre à l’insaisissable du monde souterrain, selon le maât, loi de l’univers : il fonde l’apparence en vérité. »

 

Bernard VADON

 

  1.  Le roman de Sylvie Bauche « La lampe cachée du Nil » est distribué par Amazon. 

(478 pages-format 189 mn X 246 mn)

Mais aussi : « Les couleurs du Delta » (cours de la saison 2008/2009)
ISBN 9782953 446401  
« Imagerie du Delta » préfacée par le Dr Wafaa el Saddick, directrice générale du  Musée archéologique du Caire, et parrainé par l’institut d’Égypte de Paris.

ISBN 979 8636 478201