AU CŒUR DU BEARN DANS LE SUD-OUEST FRANCAIS BERNARD LADAGNOUS, UN APILCULTEUR PASSIONNE ENGAGE DANS LA LUTTE CONTRE LA DISPARITION PROGRAMMEE DES ABEILLES 

Publié le 6 Octobre 2018

A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.
A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.

A Igon (64) sur le chemin de Hourtina, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses précieuses pensionnaires.

 

 

En ce chaud mois de septembre, à quelques kilomètres de Pau, la route serpente entre les collines herbues, ponctuées çà et là d’îlots arborés. Une riche région promise, parmi d’autres terres promises, plus précisément celle du Sud Ouest en France et singulièrement le Béarn terre natal du Roi de France et de Navarre, Henri IV.

Quelques vaches et autres brebis et chèvres cherchent, sans cesser de brouter, une douce fraîcheur.

Soudain, la route traverse un de ces villages aux maisons typiques regroupées autour du clocher de l’église.  Igon en Béarn.

Ici, le temps paraît s’être focalisé dans une sorte de célébration d’une civilisation dévolue à la terre nourricière.

Comme hier, il me souvient combien les dégradés de vert au gré de ces riches pâturages se colorent naturellement en suivant la courbe solaire.

Ici, nous sommes au cœur d’un passé aussi brillant que millénaire. A deux pas des grottes d’Isturitz et d’Oxocelhaya du côté des massifs mythiques de la Rhune, du Baïgara et de l’Ursuya.

La route qui suscite l’enchantement. Une route aux spécialités goûteuses qui de Bruges à Arudy mène à la frontière espagnole par ce fameux col célébré chaque année lors du Tour de France. Voilà pour le décor.

Comme on le chante plutôt qu’on ne le dit en béarnais : « nouste », textuellement chez nous.

 

PRODUIT D’EXCEPTION

L’envie me prend d’en référer une nouvelle fois à Gustave Flaubert dans « Madame Bovary » :

« Les bonheurs futurs, comme les rivages des tropiques, projettent sur l’immensité qui les précède leurs mollesses natales, une brise parfumée et l’on s’assoupit dans cet environnement, sans même s’inquiéter de l’horizon que l’in n’aperçoit pas. »

 

Des noms mythiques comme sertis dans cette riche terre nourrie par les allusions du fleuve Gave : Saint Jacques de Compostelle, Lourdes bien sûr mais aussi le Pic du Midi et les cols célèbres du Soulor, de l’Aubisque, du Tourmalet, Pourtalet et autres Peyresourde et Aspin. Toute une chaîne magestueuse reprise en illustration des pots de miel du pays.

De manière plus préoccupante, Albert Einstein et Charles Darwin – est-il nécessaire de le rappeler - ont résolument préfiguré notre avenir en fonction de la préservation de la fameuse « apis mellifera », autrement et plus communément nommée, l’abeille domestique.

Aujourd’hui, les abeilles se meurent et leur disparition engagera, à plus ou moins brève échéance, notre processus vital.

Ce n’est plus une question de qualité gastronomique par rapport à un produit d’exception dont les vertus remontent en des temps immémoriaux mais plus clairement, et sans exagérer, une affaire grave liée au fait que notre existence sur terre ne sera plus tout à fait comme avant en raison de leur disparition.

Sur ce point, Bernard Ladagnous est en accord avec toute la communauté des apiculteurs locaux.

Lui aussi est entré au royaume des abeilles un peu comme on entre en religion. Son père se passionnait en amateur pour les abeilles mais c’est un homme du sérail qui lui a vraiment transmis son héritage : Maurice Calestremé aujourd’hui disparu mais qui à la veille du grand voyage n’a pas souhaité que son expérience disparaisse avec lui.

 

MOT CLE

Bernard Ladagnous évoque avec émotion ce temps passé avec le maître. Il met d’ailleurs un point d’honneur à faire partager la passion qui lui a été transmise et faire connaître l’abeille aux enfants et aux jeunes, notamment dans le cadre d’actions de partenariat avec les établissements scolaires.

Aujourd’hui, sur ce chemin de Hourtina avec les Pyrénées en toile de fond, il s’emploie à perpétuer une activité confrontée à une civilisation asservie à une modernité plus destructrice que constructive.

En l’occurrence et de façon plus circonstancielle, le lobby agro-alimentaire, notamment celui d’Outre-Atlantique auquel sont venus s’ajouter avec encore plus d’agressivité les asiatiques et les chinois en tête de peloton sans compter avec d’autres pays émergents qui font la pluie et le beau temps économique, manifestement plus motivés par la situation des marchés financiers que par la santé et par voie de conséquence, la survie de l’être humain.

Produire s’imposant pour cette frange d’individus néfastes et cupides, comme le mot clé d’une politique profondément égoïste qui, pour se justifier invoque la mission perverse et déguisée de nourrir, envers et contre tout, la planète et tous les affamés dont le nombre n’a de cesse d’augmenter. La « mal-bouffe » n’est pas une vaine expression.

Dans ce combat de dupes, la chimie prévaut et les pesticides se révèlent, au final, comme une arme à double tranchant et surtout permissive en regard de produits finalement plus dangereux qu’utiles. Le glyphosate, ce dangereux herbicide total foliaire systémique. Un descriptif savant pour dissimuler avec l’ensemble des pesticides une triste réalité affectant la santé.  

 

SPIRALE INFERNALE

Les acteurs opposés à cette politique du produire n’importe comment pour fournir du n’importe quoi, s’efforcent de promouvoir d’autres méthodes non sans difficultés. Une goutte d’eau dans l’océan qui n’a rien à envier à la terre.

Je pense aux promoteurs de la « permaculture » et autres méthodes bio.

Cependant la spirale infernale nous entraîne de plus en plus vers le bas et l’abeille, la minuscule, mais ô combien savante et énigmatique « apis mellifera », ne parvient plus à tenir la dragée haute à ces pourfendeurs de la vie sur terre, indifférents à la disparition d’une espèce indispensable, via la pollinisation, au renouvellement végétal.

Sans ce maillon de vie essentiel et naturel à la pérennité de l’espèce humaine, nous imaginons facilement, pour l’homme en particulier mais aussi pour les animaux, les conséquences fatales à plus ou moins brève échéance.

Singulièrement– et j’en connais – ceux que les abeilles n’ont de cesse de surprendre par leur intelligence, leurs codes et leur sens inné de l’organisation sont très inquiets.

 

Dans sa miellerie du discret mais charmant village de Igon, à deux pas de ce qui fut la résidence du comte de Saint-Cricq, Bernard Ladagnous est aux petits soins pour ses pensionnaires à l’existence comptée en jours (un mois en principe) laissant à la reine le bonheur de vivre pratiquement quatre années, choyée par ses congénères et jalousement protégée par des escouades de gardiennes.

Une société manifestement matriarcale sinon royale savamment classée dans un clade (ou groupe) d’insectes hyménoptères de la famille des apoïdes.

 

20.000 ESPECES

Les éthologistes en dénombreraient 20.000 espèces de par le monde dont environ 2000 en Europe et un millier en France aux facultés cognitives qui permettent à leur égard de parler d’intelligence collective. Fascinant !

Un monde à divers titres mystérieux que frappe, malheureusement et depuis ces dernières années, le terrible fléau de Colony Collapse Disorder  (syndrome d’effondrement des colonies ou ruches) .

La météorologie capricieuse et l’effet désastreux des pesticides ainsi que l’arrivée du redoutable frelon asiatique ainsi que de l’acarien non moins dévastateur, le varroa destructor qui parasite l’abeille adulte – lui aussi originaire de l’Asie du Sud-Est à quoi il faut ajouter la diminution des cultures de tournesol et de colza qui vont accélérer selon les professionnels et notamment l’observatoire français d’apidologie, la diminution importante de la production annuelle de miel.

Comme l’ensemble des professionnels Bernard Ladagnous est conscient du drame qui se joue.

Pourtant, il lui faut, comme ses pairs, poursuivre la tâche et s’efforcer d’améliorer le confort des abeilles. Notamment, lors du transport des ruches sur les sites adéquats – un périmètre d’une trentaine de kilomètres -  où croissent les végétaux dont les fleurs butinées et par pollen interposé, résultat d’une alchimie extraordinaire, qui communiqueront les saveurs spécifiques du tilleul à l’acacia en passant par la bruyère, le châtaignier et ces fleurs de printemps sans oublier la bruyère avec sa belle floraison couleur violette. 

L’apiculteur veille jalousement sur la santé des abeilles jusqu’à la mise en bocal du précieux nectar après les multiples étapes de transformations dont la récupération des cadres dans les ruches avant de les désoperculer en enlevant la pellicule de cire qui obstrue les alvéoles et permettre au miel de couler après son extraction avant la maturation au terme de laquelle le miel sera prêt.

De cette magique alchimie, outre le miel, des substances aux vertus souvent insoupçonnées seront commercialisées : du pollen frais ou sec à la propolis en passant par l’énigmatique gelée royale.

 

 

Cet été, face à la menace du recours massif aux néonicotinoïdes et d’une biodiversité qui se meurt, des mesures ont été diligentées pour sauver les abeilles et préserver la consommation d’un produit aux multiples propriétés.

Un nouveau coup d’épée dans l’eau de notre incurie ?

A présent, de quoi demain sera t-il fait et que restera t-il de cette belle odyssée sinon l’emblématique flacon aux abeilles – réalisé en 1853 – inspiré à l’impératrice Eugénie soucieuse « d’habiller » son Eau de Cologne Impériale ? 

En l’occurrence, un flacon mythique et somptueux signé Guerlain avec soixante neuf abeilles dorées à l’or fin et rappelant par ses étiquettes vertes les « tuiles » du dôme de la colonne Vendôme conçu par le verrier Pochet et du Courval . Pas moins !

 

« Parfois on trouve un vieux flacon qui se souvient

D’où jaillit toute vive une âme qui revient. » chante le poète.

 

Suite à cette belle découverte sous le signe de l’abeille, nous réitérons notre souhait à savoir que l’âme de l’abeille martyrisée investisse à nouveau et en nombre nos campagnes et nos jardins urbains.

Ne serait-ce que pour perpétuer, embellir la vie et surtout nous épargner des lendemains qui pleurent.

 

Bernard VADON