MARRAKECH - Dar Moulay Ali - Maison de la France - A la recherche du temps perdu !

Publié le 29 Mai 2017

Une assistance nombreuse et de qualité - français et marocaine - au coeur d'un nouvel atout culturel.
Une assistance nombreuse et de qualité - français et marocaine - au coeur d'un nouvel atout culturel.
Une assistance nombreuse et de qualité - français et marocaine - au coeur d'un nouvel atout culturel.
Une assistance nombreuse et de qualité - français et marocaine - au coeur d'un nouvel atout culturel.

Une assistance nombreuse et de qualité - français et marocaine - au coeur d'un nouvel atout culturel.

 

Ce dernier 22 mai, l’assistance par le nombre et la qualité était à la mesure de l’événement précédant le prochain et traditionnel 14 juillet.

Le ciel, en cette pré-nuit printanière, était au mieux de son état, les bulbuls cousins de ceux d’Arabie, en concert exceptionnel, animaient quant à eux et à leur façon charmante les hautes futaies du parc comme s’il voulaient ajouter à l’ambiance sonore un moment dominée, depuis la proche Koutoubia surplombant la résidence consulaire, par le chant monocorde et pur du muezzin de service.

La sourate invitant à la méditation du moment achevée, les festivités présidant à l’inauguration de Dar Moulay Ali – autrement nommé la Maison de la France - reprenaient leurs droits en présence des plus hautes autorités marocaines de la place et côté français de l’ambassadeur de France au Maroc, Jean-François Girault. Etait également présent, outre le consul général Eric Gérard et son épouse Véronique - qui a beaucoup œuvré pour ce renouveau de ce lieu – M. Christophe Pomez, directeur délégué de l’Institut Français de Marrakech.

On procédait en effet et officiellement ce soir là à l’inauguration des différents travaux engagés sous l’autorité du consulat dans le cadre d’une restauration quasi générale de ce haut lieu édifié au XIXème siècle, porteur de tant de messages historiques, mais aussi de ses abords dont une galerie d’exposition, un salon de thé et une boutique dite de voyage.

Sans oublier la singularité d’un jardin andalou revisité sous la forme originale d’un parcours poétique.

Eric Gérard, dans une longue et intéressante intervention, retraça le parcours inverse et exaltant de ce magnifique projet culturel.

Nous reviendrons ultérieurement et plus en détails sur ce nouvel atout culturel au coeur d’une cité mythique.

 

Retour dans le temps sur une pré-visite des lieux …

 

Marrakech - ou plus joliment Mourrakouch signifiant en tamazight pays de Dieu - cité magique et des sortilèges s’il en est, séduit de façon récurrente les moindres recoins de la planète.

La ville, aux portes du désert, est enveloppée, à la tombée du jour, d’une singulière chaleur inhibée du vent de la nuit naissante et caressée par un vent qui bruisse d’autant de sons indéfinissables et de senteurs mystérieuses. Edifiée à l’ombre protectrice de la Koutoubia dressée, majestueuse et impressionnante sur un ciel d’une extrême transparence, elle s’inscrit dans un commencement de ténèbres alors que la cantillation coranique à cappella, musicalement polyphonique, du muezzin, ajoute à l’ambiance particulière créée par l’obscurité profonde délicatement soulignée par un savant éclairage du minaret ouvragé : en somme, « l’esprit de Marrakech ».

A quelques pas de l’énigmatique place Djemâa El Fna, chargée d’histoire, Dar Moulay Ali donne le change à cette atmosphère étrange et hors normes dont les odeurs puissantes d’épices parviennent difficilement à atténuer les effluves irrésistibles et étourdissants de la végétation du parc tout proche, harmonieusement composée de jasmins ou galants de nuit, de lauriers roses et immaculés mais aussi de multiples fleurs aux couleurs douces et variées.

Sans oublier le délicat parfum des fleurs d’agrumes.

Comme la plupart des hôtes prestigieux de ces lieux on se plait, en ces instants d’extase et en filigrane de la prière, à murmurer la jouissance exceptionnelle que procurent la force et la sensualité de ces émotions subtiles.

Voilà pour les sensations.

Plongée dans le temps

Vers le milieu du XVXème siècle, sous les frais ombrages du jardin offert au généreux soleil de septembre, le caïd Suleyman As-Siyadami devise au milieu de quelques amis venus de la médina toute proche et toute frémissante d’une vie aussi singulière que mystérieuse en ce règne du sultan Moulay Abderrahmane.

Comme d’autres mythiques endroits qui ont aussi marqué son histoire - notamment les sites de l’Agdal, de la Menara mais également de la Mamounia, d’Arsat Ben Driss et de Jnane Al Afiya et autres tombeaux Saadiens et Medersa - la cité, qui affiche les couleurs du désert de ses remparts auxquels elle est puissamment arrimée afin de résister aux assauts d’un vent facilement destructeur, a su préserver l’essentiel de son originalité.

Les résidents successifs de cette résidence historique n’ont en aucun cas sacrifié aux spécificités sociales de l’époque des sultans préférant sublimer les poncifs particuliers de l’architecture berbère dont la Koutoubia est un authentique et rarissime exemple.

Sans oublier, dans un autre contexte sociétal, le caractère à nul autre pareil de la place Djemâa El Fna - inscrite au patrimoine mondial - où se produisent d’inimitables conteurs et mimes possédés par la magie du verbe, des mots et de la musique.

La vraie vie

Ces subtils « Hermès » ayant emprunté leurs partitions à la tragédie grecque et qui invitent, avec une assurance renversante, à la terre promise ainsi qu’à quelques vieux rêves enfouis dans les mémoires de ces spectateurs de l’instant. Des êtres simples et parfois rustres, imprévisibles et puérils dans leurs réactions, mais étonnamment réceptifs aux légendes orales amplifiées par le charme évanescent des ondulations de fumées entêtantes rythmant le brouhaha singulier de cette fourmilière humaine.

En somme, la vraie vie.

Au cœur de ces grégarismes révélateurs des tendances de cette foule bigarrée d’hommes, de femmes et d’enfants indisciplinés, la toile d’araignée ténue des ruelles tortueuses emprisonne la secrète et inquiétante médina

dans laquelle on peut facilement … ou volontairement s’égarer.

Ali, qui héritera de son frère Sidi Mohammed, sera le dernier occupant des lieux auquel il laissera en héritage son patronyme Moulay Ali et que l’on surnommera « le prince savant ».

En effet, ce lieu d’exception devient alors par la grâce de son brillant occupant un creuset culturel où se rencontrent les intellectuels et autres gens de lettres. Ulémas et autres soufis.

Ainsi, la grande Histoire rattrapera la petite histoire de cette grande demeure édifiée au XIXème siècle - aux allures étonnamment patriciennes et accommodées par une architecture spécifique, aux habitudes de vie patriarcale des populations autochtones insensibles au rigoureux ordonnancement des courbes à la française mais s’attachant, grâce à un savoir aussi savant que millénaire, à privilégier les enluminures délicates et les plafonds en cèdre savamment ciselés ou peints. Marbre, bejmat et ferronneries à l’andalouse, mosaïques ajoutant à la singularité des pergolas et des auvents et finalement de l’ensemble de la résidence.

Représentatif

Le Protectorat français changera la donne foncière de l’endroit et Dar Moulay Ali sera, dans un premier temps, occupée par les officiers français avant que les services du consulat, et principalement le consul général de France, ne s’y installent à leur tour.

Ainsi, au hasard de ses occupants et propriétaires, Dar Moulay Ali, sise en un site unique, sous le charme selon et à certaines heures de la belle sourate al haqqah, à deux pas de la mythique place Jemâa El Fna, se jouera, au fil des siècles et avec plus ou moins de bonheur et d’enthousiasme, des outrages du temps.

C’était sans compter avec Eric Gérard, le consul général de France – assisté de son épouse Véronique - qui reprenant le flambeau de ses prédécesseurs et plus passionnément encore s’est découvert une soudaine et constructive volonté pour perpétuer le charme de ce patrimoine culturel d’exception de la ville impériale fondée en l’an 463 de l’Hégire (en 1071) par le Sultan Youssef ben Tachfine et qui bénéficie, comme les autres sites de la Kasbah et des tombeaux Sâadiens du 16ème siècle, d’une mystérieuse aura.

Le parc sera sa priorité et la main verte du diplomate sans vouloir trahir un sympathique aveu, n’est pas étrangère à cette secrète volonté de redonner à ce lieu son éclat naturel d’origine et cela dans le droit fil des recommandations écologiques de ce début de siècle.

Un espace culturel aménagé dans le bâtiment principal est par ailleurs appelé à célébrer de façon originale et de différentes manières par l’écriture ou la peinture mais aussi la calligraphie et le dessin l’Histoire de ce lieu sans oublier les documents originaux - dont de précieuses photographies - attachés à l’histoire de l’endroit et que l’on pourra consulter.

 

A l’instar de ce qui se fait dans certains monastères, Dar Moulay Ali devrait aussi proposer – c’est en tout cas dans l’optique de ses actuels occupants - à ses visiteurs et dans un ordre d’idées plus épicuriennes, la fine fleur de son parc sous la forme de thés parfumés à la fleur d’oranger sans oublier les confitures d’oranges confectionnées selon des recettes originales avec les fruits de l’orangeraie du parc.

Plus confidentiel, le grand salon réservé aux grandes occasions ainsi qu’aux invités de marque – jusqu’à 1600 personnes seraient reçues ici-même - reste un lieu de convivialité. Là, dans un décor feutré et chaleureux est célébré en peinture et objets la riche civilisation berbère.

Conformité écologique

La France via sa représentation consulaire avait engagé il y a trois ans un plan d’action visant à développer le label vert qui lui a été décerné dans le cadre d’une charte verte. Une politique éminemment écologique basée sur le recyclage et le solaire.

Ainsi, aussi bien à la Résidence consulaire qu’au consulat administratif de l’Hivernage, les efforts ont essentiellement porté sur l’économie d’énergie réalisée notamment dans le secteur de l’arrosage ainsi que dans l’utilisation de l’eau à des fins multiples dont les sanitaires.

Le recyclage dans les fontaines est également réalisé grâce à un système de pompe permettant une mise en circuit fermé permanent. Tout comme le goutte à goutte intégré et indispensable à l’arrosage régulier des pelouses et des plantes. Parallèlement, la fabrication de compost - grâce à l’herbe et au feuillage ramassés sur place, lors des tontes - alimente un potager.  Grâce à l’énergie solaire l’économie du fuel est de l’ordre de 50%.

De la même façon, le remplacement des ampoules traditionnelles - particulièrement énergivores - par des lampes à LED - dont le composant électronique transforme l’électricité en lumière – accroit de manière considérable l’économie et prolonge tout aussi considérablement la durée de vie du matériel.

L’administration consulaire a également porté ses efforts sur le recyclage du papier et s’est tout dernièrement penchée sur l’aménagement des abords du consulat administratif, dans l’Hivernage, rue Camille Cabana..  Outre les transformations et adaptations précédemment développées, un gazon artificiel a été mis en place par les sociétés Laquet Maroc et Green Maroc. Cet « habillage » original par le matériau utilisé ne nécessite que très peu d’eau ainsi qu’un entretien limité.

L’espace se caractérise aujourd’hui par des allées en gravillons et il est agrémenté de plantations de cactées, présentant d’indéniables qualités xérophytes, ainsi que par des végétaux adaptés au climat.  Cette mise en conformité écologique engagée depuis trois ans, parfaitement adaptée aux exigences du changement climatique, tout en illustrant les consignes de la COP, tout comme la restauration de la résidence, sont diligentées et surtout financées par l’Etat français.  Enfin, les bureaux consulaires présentent aujourd’hui un aspect fonctionnel en parfaite adéquation avec la modernité administrative souhaitée, tant par les résidents français, que par la population marocaine.

Quant à la Maison de la France, au pied de la Koutoubia, sa belle et noble allure est conforme à l’idée que le marocain mais aussi le citoyen français peuvent se faire d’un lieu d’exception représentatif d’un grand pays, la France dans un pays, le Maroc, qui, traditionnellement a toujours fait de l’hospitalité une de ses qualités premières.

 

 

Bernard VADON