ORAGES, TORNADES, INONDATIONS …
Publié le 29 Novembre 2014
Quand on finit par oublier l’urgence de l’essentiel …
C’était il y a très exactement huit ans. Le protocole de Kyoto en main, Jacques Chirac, alors président de la République Française, accompagna son discours de stigmatisation de la gestion climatique en tapant violemment du poing sur une table, un geste resté aussi célèbre que celui de Nikita Khrouchchev frappant de la même manière, mais en d’autres temps et autres circonstances, sur son pupitre avec sa chaussure ; et tout récemment, à Strasbourg, le Pape François, autorité morale incontestable, a lui aussi et vigoureusement fustigé les européens. Des manifestations de colère passées à la postérité.
Instant d’Histoire :
En ce 15 novembre 2006 le président français s’exprime donc avec inquiétude dans un discours qui sera lu à la faveur d’une rencontre à Nairobi au Kenya sur le thème du préoccupant – déjà ! - dérèglement climatique.
Depuis, et au-delà des réformettes de circonstance, rien n’a tellement avancé. Sinon, la fameuse phrase écrite par Jacques Chirac et érigée aujourd’hui en slogan:
« La maison brûle et nous regardons ailleurs ! »
Si louable soit-elle, l’action va-t-elle enfin l’emporter sur l’intention ?
Et y a-t-il encore loin de la coupe aux lèvres ?
Autant de questions que l’on est une nouvelle fois en droit de se poser alors même que la priorité est de plus en plus pressante quant à une prise de conscience sérieuse sur tout ce qui touche à la qualité, de plus en plus en péril, de notre environnement.
(Voir notre blog à l’occasion du sommet organisé en septembre à New-York en présence de 120 chefs d’Etats appelés à réfléchir sur les causes du changement climatique.)
Quand le « Gulf Stream » perd aussi le Nord !
Depuis 1880 les services chargés de la climatologie relèvent et consignent méticuleusement les mille et un caprices du temps dont les précieuses températures.
Pour ce qui nous concerne il s’avère aujourd’hui que le thermomètre n’a jamais atteint de pareils scores de chaleur depuis le début 2014.
Une température inhabituelle dont les conséquences ont des effets inquiétants sur les conditions météorologiques et qui font dire au commun des mortels que le temps est devenu fou… sans pour autant prendre conscience que l’homme n’est pas totalement étranger à ces dérèglements qui se manifestent de différentes façons.
On vient de le constater ces derniers mois et encore ces derniers jours avec les inondations catastrophiques dans le Sud de la France et au Maroc en particulier mais également en bien d’autres points du globe.
Aujourd’hui, on semble pointer du doigt le déroutement pour le moment inexplicable du fameux « Gulf Stream » qui a carrément modifié sa trajectoire.
Les climatologues qui travaillent dans le temps remettent une explication de ce fait à quelques années futures. Ce qui n’est certainement du goût de ceux qui doivent de plus en plus fréquemment affronter les montées d’eau anormales avec toutes les conséquences matérielles et morales que cela entrainent.
L’alternative
Au-delà des grandes et belles déclarations en tous endroits névralgiques d’une planète qui a changé de couleur, qu’en est-il réellement de la situation ?
La question parmi les questions avec des réponses qui ne sont pas toujours en phase avec la réalité. Certes, il faut bien mourir de quelque chose mais l’insouciance qui caractérise l’homo - dont on se demande si on peut encore le qualifier de sapiens – se décline un peu partout dans le monde sous un angle où trop souvent le profit prévaut.
En l’occurrence, la liste des pollueurs … qui sont rarement les payeurs, n’est pas exhaustive. Quand à l’émission de gaz à effet de serre, elle continue de figurer parmi les sujets tabous en garnissant les colonnes et les plateaux des médias mais pour l’heure sans décisions radicales destinées à éradiquer le phénomène :
« L’alternative est entre la catastrophe climatique et un développement respectueux de l’environnement. » déclarait en son temps Jacques Chirac.
Allez raconter cela aux pays en sur développement … la Chine et autres pays d’Extrême Orient sans oublier les Etats Unis et l’ensemble des mégapoles internationales où la pollution se taille la part du lion. .. mais c’est bien le cadet de leurs soucis.
Pourtant, il est de fait que le vert est à la « une » de toutes leurs préoccupations et la traditionnelle « Journée de la Terre » initiée, il y aura bientôt prés de 45 ans en vue d’un environnement sain et durable, ne semble être qu’une vue de l’esprit.
« Paroles, paroles … » comme le chantait en son temps Dalida.
L’oubli de Dieu
Je suis quelque peu tenté de dire, partagé entre exclamation et interrogation :
Quel temps perdu ou quel temps gagné ?
Vous saisissez la nuance et surtout ses conséquences … en tout cas, pour ce qui est du temps perdu.
Pourtant, nous avons quelques signes avant coureurs non dénués d’intérêt même s’ils sont d’ordre naturel.
Tel ce bon vieux volcan islandais au nom imprononçable - qui en quelques jets de pierres incandescentes et de cendres concoctant avec la glace un explosif tout aussi naturel que catastrophique paralysant, du même coup, une partie de l’économie de la planète - ne semble guère, après ses accès de colère imprévisibles mais sacrément dommageables, avoir contribué à changer les habitudes de nos chers terriens.
Comme si les désastres naturels – d’inondations en tremblements de terre et autres tsunami - ne suffisaient pas, l’homme met sa main assassine à la pâte en oxydant l’atmosphère de carbone et en assaisonnant de pétrole gluant, plages et océans !
Pour la énième fois trop de populations ont à nouveau les pieds dans l’eau et quasiment tout perdu.
Ainsi, les jours se suivent et se ressemblent. Tragiquement parfois.
La fermeté et le réalisme sont, aujourd’hui, des passages obligés. Etablir des chartes et définir des feuilles de route est un acte nécessaire et indispensable. Il convient, cependant, de prendre le taureau par les cornes et dépasser le stade des bla-bla.
Autorité morale incontestable, le pape François, dernièrement à Strasbourg, a pris le relais du coup de poing sur la table :
« C’est l’oubli de Dieu et non sa glorification qui génère la violence. Il faut protéger la création toute entière et protéger chaque personne. »
La jeunesse est un terreau de choix et peut-être un espoir même si tout, sinon beaucoup, reste encore à faire.
A cette seule et unique condition la planète terre reprendra ses couleurs originelles et reprendra sa rotation dans le bon sens si toutefois comme le recommande Edgard Morin sur un plan plus général :
« A force de vouloir traiter l’urgence aux dépens de l’essentiel, on finit par oublier l’urgence de l’essentiel. »
Bernard VADON